Peut-on rejeter Vatican II car il s’agit d’un concile pastoral ?

Réponse à une objection au sédévacantisme

*Nota bene : Nous nous plaçons dans cet article sur le plan du droit et non du fait. Dans les faits, le concile n’est pas infaillible puisque son enseignement n’a pas été promulgué par un Pape authentique (Paul VI en l’occurrence). Nous parlons donc de ce qui, en droit, c’est-à-dire eu égard aux principes qui régissent l’Eglise et à la nature des actes posés, aurait dû être infaillible.

L’idée selon laquelle Vatican II n’est qu’un « concile pastoral » et que l’on peut donc rejeter ses enseignements en sûreté de conscience, s’attaque au fondement même de la position « sédévacantiste ». En effet, si les passages problématiques du concile et les réformes qui suivirent n’engageaient pas en droit l’infaillibilité, les erreurs qui y sont contenues ne remettraient pas en cause l’autorité de celui qui les a promulgués. Ainsi, Paul VI et ses successeurs, qui ont dispensé ces faux enseignements et mis en œuvre ces lois mauvaises auraient conservé l’autorité pontificale et seraient demeurés vicaires de Jésus-Christ.

Pour répondre, il faut donc considérer deux choses :

  • La divinité de l’Eglise et son magistère en général
  • La qualification du concile en particulier

Enfin, une courte conclusion répondra à l’objection formulée contre la position sédévacantiste.


La divinité de l’Eglise et son magistère

Jésus-Christ a fondé l’Eglise catholique pour continuer son œuvre salvatrice [1] et lui a pour cela transmis son pouvoir  d’enseigner, de gouverner et de sanctifier les âmes. L’Eglise est divine et a une vocation surnaturelle : guider surement les âmes à Dieu en leur donnant les moyens du salut. Pour accomplir cette mission, Dieu l’assiste continuellement en demeurant avec elle.

« Allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père, du Fils, et du Saint-Esprit, et leur enseignant à observer tout ce que je vous ai commandé. Et voici que je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la consommation des siècles »

Matth. XXVIII, 19-20

Pour aimer Dieu et nous sauver en l’atteignant comme notre fin, il faut d’abord le connaître dans son intimité puisqu’on ne peut atteindre ce qu’on ne connaît pas. Cette connaissance intime de Dieu nous dépasse et nous ne pouvons l’atteindre que parce que Dieu a parlé directement aux hommes en se révélant. C’est en cette adhésion de l’intelligence aux vérités révélées par Dieu que consiste la foi. L’Eglise, par son magistère, c’est-à-dire son enseignement, nous atteste avec certitude que telle ou telle vérité est révélée, et, par conséquent, oblige notre assentiment. L’Eglise est la règle prochaine de notre foi [2], la gardienne, la colonne et le fondement de la Vérité (1 Tim. III, 15). L’Eglise est un admirable trésor de Dieu, elle est un roc immaculé d’une importance capitale pour notre salut : elle éclaire et surélève nos intelligences par la conservation et l’explication du dépôt révélé, objet de la foi.

Jésus-Christ a donné à saint Pierre et à ses successeurs, les papes, la primauté suprême sur l’Eglise. Ils en sont les chefs, vicaires de Jésus-Christ.

« Et Moi, Je te dis que tu es Pierre, et que sur cette pierre Je bâtirai Mon église, et les portes de l’enfer ne prévaudront point contre elle. Et Je te donnerai les clefs du royaume des Cieux ; et tout ce que tu lieras sur la terre sera lié aussi dans les Cieux, et tout ce que tu délieras sur la terre sera délié aussi dans les Cieux »

Matth. XVI, 18-19

Si l’Eglise n’était pas revêtue de l’autorité de Dieu, et si son magistère n’était pas la règle prochaine de notre foi, nous ne serions certains de rien : ni le culte, ni le canon des livres de la Bible, ni les dogmes fondamentaux de la religion, ne seraient certainement véridiques et agréables à Dieu. L’idée d’une « Tradition » qui servirait de règle prochaine de la foi ne nous sortirais pas de manière définitive du doute et de l’incertitude : nous en serions réduits, comme les sectes protestantes, à des divisions intestines et à des querelles pour savoir ce qui est vraiment traditionnel, ce qui a vraiment été cru « partout et toujours ». C’est pourquoi il a toujours été évident pour les catholiques (avant Vatican II) que l’enseignement ordinaire de l’Eglise était la règle prochaine de la foi, et que c’est l’Eglise enseignante qui a autorité pour savoir ce qui est traditionnel ou non, au sens de la Tradition apostolique.

« L’Eglise universelle ne peut se tromper, car elle est gouvernée par le Saint-Esprit, qui est l’Esprit de vérité : le Seigneur, en effet l’a promis à ses disciples en disant (Jean XVI, 13) : « Lorsqu’il viendra, l’Esprit de vérité, il vous enseignera toute la vérité ». »

Saint Thomas d’Aquin, Somme théologique, II-II, q. 1, a. 9

« Notre position est donc que l’Eglise ne peut absolument pas se tromper, ni dans les choses absolument nécessaires, ni dans les autres choses qu’elle nous propose à croire ou à faire, que ces choses soient expressément dans l’Ecriture ou qu’elles n’y soient pas. »

Saint Robert Bellarmin, Des conciles et de l’Eglise ; Lib. III : De l’Eglise militante répandue sur toute la terre, Ch. XIV : l’Eglise ne peut errer

« Vous avez ouï dire, Théotime, que dans les conciles généraux il se fait des grandes discussions et recherches de la vérité, par discours, raisons et arguments de théologie; mais la chose étant débattue, les pères, c’est-à-dire les évêques, et spécialement le pape, qui est le chef des évêques, concluent, résolvent et déterminent, et la détermination étant prononcée, chacun s’y arrête et acquiesce pleinement, non point en considération des raisons alléguées en la discussion et recherche précédente, mais en vertu de l’autorité du Saint-Esprit qui, présidant invisiblement dans les conciles, a jugé, déterminé et conclu par la bouche de ses serviteurs qu’il a établi pasteurs du christianisme. L’enquête donc et la discussion se font au parvis des prêtres, entre les docteurs; mais la résolution et l’acquiescement se font au sanctuaire, où le Saint-Esprit, qui anime le corps de l’Eglise, parle par la bouche de ses chefs, selon que notre Seigneur l’a promis »

Saint François de Sales, Traité de l’amour de Dieu, Livre II, chap. XIV

« C’est Dieu, c’est Jésus-Christ qui a fondé sur la terre et constitué l’Église; et c’est lui qui a divisé l’Église en deux parties, unies mais distinctes. L’Église enseignante et l’Église enseignée. L’Église enseignée est formée des laïques et des simples prêtres, lesquels ne sont, en aucun cas, juges de la foi. L’Église enseignante, par laquelle Dieu enseigne et gouverne les fidèles répandus sur toute la terre, est composée du Pape et des Évêques ; et comme c’est Dieu lui-même qui parle par elle, qui, par elle, enseigne, commande, condamne, pardonne, tout ce que l’Église enseignante lie ou délie sur la terre, est en même temps infailliblement lié et délié dans les cieux. En d’autres termes, l’Eglise enseignante est infaillible; elle ne peut se tromper ni nous tromper; elle est immédiatement assistée de Dieu. Or, le Concile n’est autre chose que l’Église enseignante assemblée; et c’est pour cela que le Concile est infaillible, et que tous ses décrets, toutes ses décisions ont un caractère d’autorité souveraine et divine. Tout le monde doit s’y soumettre ; tout le monde, sans exception. Et c’est tout simple : qui a le droit de ne pas se soumettre à Dieu »

Mgr de Ségur, L’infaillibilité du Pape, Chap. I

L’Eglise est donc infaillible parce que Dieu est infaillible. Le pape seul et les évêques unis au pape sont infaillibles lorsqu’ils enseignent ce qu’il faut croire et ce qu’il faut faire parce qu’ils en ont divinement reçu la mission de Jésus-Christ, chef invisible de l’Eglise. Un catholique aime l’Eglise parce qu’il aime Dieu ; il croit et écoute ce que lui dit l’Eglise parce qu’il a confiance en Dieu, Amour subsistant et Vérité même. Le credo nous enseigne que l’Eglise est une, sainte, catholique et apostolique : elle ne peut pas donner de poison à ses fils, elle ne peut pas se contredire, elle ne peut pas enseigner l’erreur en matière de foi, elle ne peut pas inciter au mal par de mauvaises disciplines. Même dans son enseignement « pastoral » (c’est-à-dire par ses dispositions non dogmatiques, contingentes, liées au temps et au lieu), elle ne fait qu’appliquer pratiquement des principes certains. Ses lois disciplinaires, si elles peuvent être changées par l’autorité légitime, sont vierges de tout danger et ne peuvent conduire au mal. Le contraire s’opposerait à la mission et à la constitution divine de l’Eglise. C’est ce qu’a enseigné le pape Pie VI, en 1794, dans sa bulle Auctorem Fidei par laquelle il condamna la 78ème proposition du conciliabule janséniste de Pistoie tenu en 1786 :

« Le synode prescrit l’ordre des matières à traiter dans les conférences : il dit d’abord, que « dans chaque article, il faut distinguer ce qui se rapporte à la foi et à l’essence de la religion de ce qui est propre à la discipline » ; il ajoute que, « dans cette discipline même, il faut distinguer ce qui est nécessaire ou utile pour retenir les fidèles dans le bon esprit, de ce qui est inutile ou trop pesant pour la liberté des enfants de la nouvelle alliance, et encore plus de ce qui est dangereux et nuisible, comme conduisant à la superstition et au matérialisme » (ibid., § 4). Par la généralité des expressions, le synode comprend et soumet à l’examen, qu’il prescrit, même la discipline constituée et approuvée par l’Église, comme si l’Église, dirigée par l’Esprit de Dieu, pouvait établir une discipline non seulement inutile et trop onéreuse pour la liberté chrétienne, mais encore dangereuse, nuisible et conduisant à la superstition et au matérialisme. Cette proposition est fausse, téméraire, scandaleuse, pernicieuse, offensive des oreilles pies, injurieuse pour l’Église et pour l’Esprit de Dieu par qui elle est conduite, et erronée pour le moins »

Pie VI, Auctorem Fidei

Concluons avec Léon XIII :

« Il est donc évident, d’après tout ce qui vient d’être dit, que Jésus-Christ a institué dans l’Eglise un magistère vivant, authentique et, de plus, perpétuel qu’Il a investi de Sa propre autorité, revêtu de l’esprit de vérité, confirmé par des miracles, et Il a voulu et très sévèrement ordonné que les enseignements doctrinaux de ce magistère fussent reçus comme les Siens propres »

Satis Cognitum

« Quant à déterminer quelles doctrines sont renfermées dans cette révélation divine, c’est la mission de l’Eglise enseignante, à laquelle Dieu a confié la garde et l’interprétation de sa parole; dans l’Eglise, le docteur suprême est le Pontife Romain. L’union des esprits réclame donc, avec un parfait accord dans la même foi, une parfaite soumission et obéissance des volontés à l’Eglise et au pontife Romain, comme à Dieu lui-même »

Sapientiae Christianae

La qualification de Vatican II

Nous avons vu que l’infaillibilité du magistère de l’Eglise vient de Dieu. Il a pour objet les vérités révélées par Dieu et liées nécessairement à la révélation. Il a pour sujet le pape seul ou les évêques unis au pape. Il peut aussi s’exercer selon différents modes : solennel ou ordinaire. Ces subtilités ne doivent pas éclipser l’essentiel : l’Eglise est infaillible dans son enseignement sur la foi et les mœurs en vertu de l’assistance continuelle qu’elle reçoit de Dieu. Quand elle donne un tel enseignement, le fidèle doit le recevoir dans la lumière de la foi comme une vérité certaine.

Le concile Vatican II se tient du 11 octobre 1962 au 8 décembre 1965. Il réunissait 2450 pères conciliaires et a mené à la « promulgation » de quatre constitutions, trois déclarations et neuf décrets. Normalement, un tel concile œcuménique est l’expression du magistère solennel de l’Eglise enseignante. Cependant, l’absence de définition solennelle et la déclaration de Paul VI lors d’une audience du 12 janvier 1966 [3] le classe plutôt au sein du Magistère ordinaire et universel de l’Eglise. Cette expression est utilisée par le Concile Vatican I (1870) pour expliciter les modes d’exposition des vérités de foi. La Députation de la foi, commission de 24 membres chargée de donner aux Pères conciliaires le sens exact des textes, s’appuie sur la lettre envoyée par Pie IX à l’archevêque de Munich pour expliquer ce qu’est le magistère ordinaire et universel :

« Quand il ne s’agirait que de la soumission qui doit se manifester par l’acte de foi divine, on ne pourrait pas la restreindre aux seuls points définis par les décrets des conciles œcuméniques ou des Pontifes romains et de ce Siège apostolique ; il faudrait encore l’étendre à tout ce qui est transmis comme divinement révélé par le magistère ordinaire de toute l’Eglise dispersée sur la terre »

Pie IX, Tuas Libenter, 1863

Le Magistère ordinaire et universel est donc l’enseignement quotidien de l’ensemble des évêques unis au pape. Comme le signale Pie IX, Les évêques sont habituellement dispersés sur la terre lorsqu’ils exercent ce magistère. Cependant, l’union physique (un concile) de l’Eglise enseignante (pape et évêques) n’abolit pas leur union formelle (accord moral sur ce qui est enseigné) dans l’enseignement. Ces qualifications désignent des modes d’exercice accidentels du Magistère. Solennel ou ordinaire, papal ou universel (évêques unis au pape), en concile ou dispersé sur la terre, c’est la nature de l’acte magistériel et de son contenu qui est essentiel. Ce qui doit faire l’objet d’un acte de foi et d’un assentiment religieux des fidèles, c’est la vérité révélée par Dieu ou rattachée à la révélation, indépendamment de la manière dont elle est présentée par le pape et l’Eglise. C’est l’enseignement du Concile Vatican I sur l’objet de la foi :

« Est à croire de foi divine et catholique tout ce qui est contenu dans la Parole de Dieu ou écrite ou transmise, et que l’Eglise, soit par un jugement solennel, soit par son magistère ordinaire et universel, propose à croire comme divinement révélé. »

Constitution Dei Filius

C’est ce que confirme Léon XIII en reprenant les enseignements du Concile Vatican I :

« Quand il s’agit d’établir les limites de l’obéissance, que personne ne s’imagine que la soumission à l’autorité des pasteurs sacrés et surtout du Pontife Romain s’arrête à ce qui concerne les dogmes, dont le rejet opiniâtre ne peut aller sans le crime d’hérésie. Il ne suffit même pas de donner un sincère et ferme assentiment aux doctrines qui, sans avoir été définies par un jugement solennel de l’Eglise, sont cependant proposées à notre foi, par son magistère ordinaire et universel, à la croyance des fidèles comme étant divinement révélées ; et que l’on doit croire, selon le décret du Concile du Vatican de foi catholique et divine »

Léon XIII, Sapientiae Christianae

Le concile Vatican II aurait donc dû jouir de l’infaillibilité toutes les fois où il affirme dans ses enseignements que telle ou telle vérité est révélée par Dieu ou rattachée à la révélation. Or, ce lien avec la révélation est affirmé dans de nombreux documents issus du concile. Ceci est normal, puisqu’un concile a justement pour but de proposer aux fidèles des vérités à croire pour éclairer leur intelligence avec certitude dans la voie du salut. Prenons par exemple la déclaration Dignitatis Humanae sur la liberté religieuse, « promulguée » le 7 décembre 1965 par Paul VI :

« Le Concile du Vatican déclare que la personne humaine a droit à la liberté religieuse. […] Il déclare en outre que le droit à la liberté religieuse a son fondement dans la dignité de la personne humaine telle que l’on fait connaître la Parole de Dieu et la raison elle-même. […] Cette doctrine de la liberté a ses racines dans la révélation divine, ce qui, pour les chrétiens, est un titre de plus à lui être saintement fidèles […] L’Eglise, donc, fidèle à la vérité de l’Evangile, suit la voie qu’ont suivie le Christ et les Apôtres lorsqu’elle reconnaît le principe de la liberté religieuse comme conforme à la dignité de l’homme et à la Révélation divine, et qu’elle encourage une telle pratique »

Déclaration Dignitatis Humanae

Le concile affirme ici l’existence d’un droit à la liberté religieuse inhérent à la nature même de l’homme. Il ne s’agit nullement d’une tolérance de fait pour éviter un plus grand mal mais d’un droit inaliénable et indépendant des circonstances. Ce droit inconditionnel attaché à la nature humaine est explicitement enseigné comme étant contenu dans la Parole de Dieu où il trouverait son fondement et sa justification. Par conséquent, il doit faire l’objet d’un acte de foi divine et catholique de la part des fidèles.

Paul VI confirme « la promulgation » de ce texte en vertu de sa suprême autorité :

« Tout l’ensemble et chacun des points qui a été édictés dans cette déclaration ont plu aux Pères conciliaires. Et Nous, en vertu du pouvoir apostolique que nous tenons de Christ, en union avec les vénérables Pères, Nous les approuvons, arrêtons et décrétons dans le Saint-Esprit, et Nous ordonnons que ce qui a été établi en concile soit promulgué pour la gloire de Dieu. Rome, à Saint-Pierre, le 7 décembre 1965, Moi, Paul, Evêque de l’Eglise catholique. »

Déclaration Dignitatis Humanae

Loin d’être un conseil purement pratique ou pastoral, la liberté religieuse est définie par celui qui aurait dû jouir de l’autorité pontificale comme un droit naturel explicitement contenu dans la Révélation.

Si par pastoral, il faut entendre ordinaire, non solennel, alors nous concédons que Vatican II soit pastoral. Si il faut entendre non-doctrinal (et que serait-il alors ? Pourquoi aurait-il eu lieu ? De quoi aurait-il parlé ?), ne s’imposant en aucune façon à la foi des croyants, nous nions. Vatican II n’est pas pastoral en tant que tel tout comme il n’aurait pas dû être infaillible dans la moindre de ses phrases. En revanche, en tant que concile théoriquement promulgué par l’autorité du pape et en vertu du magistère vivant et infaillible dont Jésus-Christ a doté l’Eglise, ses enseignements en matière de foi et de morale auraient dû être infaillibles et impérer conséquemment un acte de foi de la part des fidèles. Par ailleurs, il fût compris comme telle par les pères conciliaires, les théologiens et les imposteurs qui se succédèrent sur le siège apostolique. [4] Citons Yves Congar, peritus au concile, « élevé au cardinalat » par Jean-Paul II en 1994 :

« Vatican II a été doctrinal. Le fait qu’il n’ait pas « défini » de nouveaux dogmes ne retire rien à sa valeur doctrinale, selon la qualification que la théologie classique donne, de façon différentiée, aux documents qu’il a promulgués. Certains sont « dogmatiques », ils expriment la doctrine commune, ils seraient comparables aux grande encycliques doctrinales (qu’ils citent d’ailleurs souvent), à cela près qu’ils expriment, par la voie (et la voix) du magistère extraordinaire l’enseignement de ce que Vatican I a appelé « le magistère ordinaire et universel ». Tel est le statut de Lumen Gentium, des parties doctrinales de Dei Verbum, de la Constitution sur la liturgie et de Gaudium et spes, mais aussi de plusieurs « décrets » et de la déclaration Dignitatis Humanae personae. D’autres textes ou parties de ces mêmes documents sont de nature purement « pastorale » c’est-à-dire donnant, selon la prudence surnaturelle des pasteurs réunis en concile, des directives en matière pratique. »

Yves Congar, Le Concile de Vatican II, édit. Beauchesne, 1984, p.64

Si donc l’on rejette à bon droit le concile et ses suites qui subvertissent objectivement la foi catholique et entraînent une destruction du culte et de la morale, il faut rejeter du même coup l’autorité de ceux qui en sont responsables. Autrement, on en vient à défendre par naïveté ou par entêtement des absurdités injustifiables, on se perd dans des gauchissements de la doctrine catholique en s’éloignant toujours plus de la vérité.

Mathis C.


[1] « L’Eglise, c’est Jésus-Christ répandu et communiqué » écrivait Bossuet.

[2] Ce que nous croyons à proprement parler est la Parole de Dieu, objet de notre foi. Cette parole est toute entière contenue dans la Sainte Ecriture et dans la Tradition, c’est la règle éloignée de la foi. Pour la connaître avec certitude nous avons besoin que le magistère de l’Eglise nous dise avec une autorité infaillible où se trouve la parole de Dieu et comment nous devons l’interpréter; que ce même magistère nous dise encore tout ce qui lui est contraire et qu’il faut éviter, c’est la règle prochaine de la foi. Saint Pie X rappelait lors d’une visite à des étudiants cet enseignement fondamental pour tout bon chrétien : « Le premier et le plus grand critérium de la foi, la règle suprême et inébranlable de l’orthodoxie est l’obéissance au magistère toujours vivant et infaillible de l’Église établie par le Christ « columna et firmamentum veritatis, la colonne et le soutien de la vérité ».  Nous renvoyons le lecteur à un autre article sur la règle de notre foi : https://www.sodalitium.eu/regle-de-foi/ 

[3] « Etant donné son caractère pastoral le Concile a évité de proclamer selon le mode extraordinaire des dogmes dotés de la note d’infaillibilité. Toutefois le Concile a attribué à son enseignement l’autorité du magistère suprême ordinaire ; cet enseignement est manifestement authentique et doit être accepté par tous les fidèles suivant les normes que lui a attribuées le Concile, compte tenu de la nature et du but de chaque document » (La Documentation Catholique, n° 1466, 1966, p.420)

[4] Le 30 janvier 2021, François recevait au Vatican l’Office national italien de la catéchèse. Il rappelait que le concile faisait partie du magistère et qu’à ce titre, il n’était pas négociable : « C’est le magistère : le Concile est le magistère de l’Eglise. Sois tu restes avec l’Eglise et donc tu suis le Concile, et si tu ne suis pas le Concile ou si tu l’interprètes à ta façon, comme tu veux, tu ne restes pas avec l’Eglise. Nous devons être exigeants sur ce point, sévères. Le Concile ne doit pas être négocié, pour avoir plus de ceci… Non, le Concile est ainsi. » https://fr.zenit.org/2021/01/30/le-pape-exhorte-leglise-a-ne-pas-avoir-peur-decouter-les-questions-les-fragilites-les-incertitudes/ 


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