Les chrétiens en Terre Sainte aujourd’hui : entretien avec l’abbé Ugo Carandino

Nous reproduisons ici un entretien avec l’abbé Ugo Carandino paru en janvier 2024 sur un site internet italien, Il Maccabeo. L’abbé Carandino revient sur l’histoire et l’état actuel des communautés chrétiennes en Palestine, en tenant compte de l’intensification de la guerre depuis octobre 2023. Bonne lecture.

Carte de la Terre Sainte et plan de Jérusalem au temps de Jésus

La situation de conflit permanent opposant Israël et la Palestine fait périodiquement l’objet d’une attention médiatique importante, fluctuant en fonction de l’ampleur et de l’intensité des affrontements. Cependant, derrière et au-delà des bruits des missiles, des déclarations pompeuses, des négociations politiciennes et des accords internationaux, se cache une histoire silencieuse, oubliée et ignorée : c’est la vie des chrétiens en Terre Sainte, une vie difficile et éprouvante, faite de discrimination et d’oppression. Nous avons le plaisir de rapporter sur notre site Il Maccabeo, sous la forme d’un entretien, les considérations de l’abbé Ugo Carandino à ce sujet. Prêtre de l’Institut Mater Boni Consilii, il s’est rendu plusieurs fois en pèlerinage en Terre Sainte, ce qui fait de lui un observateur attentif des événements affectant la vie des chrétiens en Israël et en Palestine.

L’histoire et l’importance des chrétiens en Terre Sainte

Il Maccabeo : Monsieur l’abbé, nous tenons tout d’abord à vous remercier de l’amabilité dont vous faites preuve en vous rendant disponible pour répondre à nos questions. Pour comprendre l’actualité sans s’arrêter à des considérations superficielles, il est nécessaire de connaître le contexte historique des phénomènes que nous étudions. Une idée historique fausse mais commune voudrait que les chrétiens aient, pour l’essentiel, disparu de Terre Sainte avec l’arrivée des armées musulmanes au VIIe siècle. L’épopée des Croisade (à partir du XIe siècle) n’aurait été qu’une sorte de « vengeance », ou tout au plus une entreprise injuste, anachronique et sans espoir. Cependant, nous savons de sources britanniques que dans la première moitié du XXe siècle, les chrétiens de ces terres représentaient encore environ un dixième de la population totale. Qu’est-ce qui a conduit à une réduction numérique aussi drastique que celle que l’on constate aujourd’hui, en l’espace de quelques décennies seulement ?

Abbé Carandino: Le christianisme est né en Palestine et continue d’y exister depuis, alternant des moments heureux et des moments particulièrement difficiles. Une date significative à noter concernant la présence chrétienne en Terre Sainte est le 11 décembre 1917, lorsque les troupes britanniques, françaises et italiennes (il y avait un noyau de carabinieri reali italiens) entrèrent à Jérusalem. L’Empire ottoman fut alors vaincu, et après plusieurs siècles de domination musulmane, la ville sainte et la Palestine (à l’époque la partie septentrionale uniquement) se sont à nouveau retrouvées sous le gouvernement de nations « chrétiennes » (au moins par l’histoire). L’enthousiasme des représentants des différentes Églises (ou plutôt de l’Église catholique et des sectes non catholiques) était au plus haut, des images de soldats victorieux associées à celles des anciens croisés circulaient, et la possibilité de rechristianiser la Terre Sainte apparaissait à l’horizon. Le fait que le général Allenby, commandant britannique, ait fait lire la proclamation de la victoire aux troupes européennes par un frère franciscain a accru les espoirs des catholiques.

Entrée du Général Allenby à Jérusalem, 11 décembre 1917

En effet, la reconstruction de nombreux sanctuaires détruits par les persécutions et les catastrophes naturelles a eu lieu précisément dans ces années-là. L’année 2024 marque par exemple le centenaire de la construction de deux des églises les plus importantes de Terre Sainte, celle de la Transfiguration sur le Mont Thabor et celle de l’Agonie à Gethsémani, deux chefs-d’œuvre de l’architecte Barluzzi. A l’époque, les différentes congrégations religieuses rivalisaient pour ouvrir un établissement dans les Lieux Saints, et les différents gouvernements favorisaient ces colonies. Le gouvernement italien, par exemple, faisait la promotion de la culture et de la langue italienne en Palestine à travers l’ANSMI (Association Nationale d’Aide aux Missionnaires Italiens), fondée par Ernesto Schiapparelli.

Basilique de la Transfiguration, Mont Thabor

De toute évidence, c’était avant tout la composante chrétienne de la population palestinienne – on peut l’estimer à 15 %, avec des pourcentages élevés dans des villes comme Nazareth et Bethléem – qui espérait un avenir radieux, après des siècles de vexation. Mais les revues franciscaines de Terre Sainte ont rapidement identifié le projet sioniste comme une menace pour ces espoirs de restauration. Malheureusement, ces craintes se matérialisèrent, et à partir de 1948 (date de la proclamation de l’État d’Israël) commença l’exode des chrétiens, en particulier de la bourgeoisie, qui représentait une composante qualifiée de la classe dirigeante locale.

Une nouvelle réduction du nombre de chrétiens s’est produite après la guerre des Six Jours en 1967. Si en 1948 les catholiques de rite latin à Jérusalem étaient au nombre d’environ 90 000, aujourd’hui, en y ajoutant les catholiques de tous rites et les chrétiens des différentes « églises », nous arrivons à 9 000 personnes ! Le pourcentage total est aujourd’hui tombé en dessous de 2% et, avec la guerre actuelle, de nombreux jeunes chrétiens, qui ne trouvent pas de perspectives d’emploi ni de sécurité pour leur famille, envisagent sérieusement de partir à l’étranger.

La persécution des chrétiens en Terre Sainte

Il Maccabeo : Vous vous êtes rendu plusieurs fois en pèlerinage en Terre Sainte. Que pouvez-vous nous dire de ce que vous avez observé concernant la vie quotidienne des chrétiens dans ce qu’on appelle l’État d’Israël ? Ici aussi, la vulgate commune dépeint une situation de « tolérance » à l’européenne (issue de idées maçonniques et des Lumières). Cependant, les images récentes et répétées de crachats dans la rue dirigés contre des religieux ou des pèlerins chrétiens, ou même de véritables agressions sont le plus souvent qualifiées par les autorités de chamailleries ou s’ils elles sont punies, le sont de façon très légère, bien en dessous de ce qu’elles mériteraient.

Abbé Carandino : Pour répondre, je me réfère à la réponse précédente, car les espérances déçues et l’occasion de restauration manquée qui suivirent 1917 peuvent nous aider à comprendre la situation actuelle. Aujourd’hui, nous sommes habitués à considérer la présence d’autorités civiles non chrétiennes comme tout à fait normale en Terre Sainte, avec un choix qui se réduit à des institutions juives ou musulmanes. Après la chute de l’Empire ottoman (un des nombreux bouleversements géopolitiques de la Première Guerre mondiale, événement tragique et providentiel pour ceux qui poursuivaient des projets ambitieux), l’organisation politique et sociale de la Palestine pouvait revenir dans le giron du christianisme, et donc faire en sorte que les Palestiniens baptisés se retrouvent doublement « chez eux » (charnellement et spirituellement), protégés par une législation favorable.

Le passage du pouvoir non chrétien des Turcs au pouvoir tout aussi non chrétien des sionistes, qui est particulièrement exclusif, a donné naissance à la situation actuelle. Aujourd’hui, les chrétiens sont considérés comme des invités, dans un déni total de leur double lien avec la Terre Sainte, comme héritiers des premières communautés chrétiennes et comme population locale indigène. Si les manifestations d’intolérance de certains groupes juifs évoqués dans la question touchent particulièrement le clergé (local ou visitant les Lieux saints), tous les chrétiens palestiniens en Israël sont pénalisés par une loi approuvée en 2018, qui définit l’État d’Israël comme « le pays d’origine du peuple juif », dans lequel les non-juifs sont précisément des invités étrangers, plus ou moins bienvenus chez les autres. À la suite de cette innovation législative et du durcissement de la ligne gouvernementale, les cas d’intolérance religieuse envers les bâtiments et les personnes de différentes communautés se sont multipliés ces dernières années dans la vieille ville de Jérusalem, provoquant l’amertume des communautés locales.

La police s’interpose entre des Juifs et le monastère franciscain de la Flagellation, Jérusalem, 4 octobre 2023

Il Maccabeo : Quelle est la condition des chrétiens dans les territoires palestiniens, d’après ce que vous avez observé ou entendu ?

Abbé Carandino : La frustration face au contexte dans lequel ils sont contraints de vivre est évidente, comme le montre par exemple l’histoire d’un jeune homme d’affaires de Bethléem, qui s’est plaint le 8 septembre dernier (2023) de ne pas avoir d’autorisation pour assister à un concert organisé à Jérusalem en l’honneur de l’Immaculée Conception : un court déplacement de quelques kilomètres seulement était rendu impossible par un mur de séparation. Eh bien, je pense que le manque de liberté de mouvement, en particulier pour les jeunes, constitue un fardeau important ; une situation qui rend les relations sérieuses entre jeunes gens encore plus difficiles pour une communauté chrétienne de plus en plus petite qui souhaite fonder de nouvelles familles catholiques.

Évidemment, ce qui s’est déclenché depuis début octobre rend tout plus difficile, tant pour les citoyens israéliens qui sont des arabes chrétiens que pour ceux qui dépendent de l’Autorité nationale palestinienne. Les médias du Patriarcat latin et de la Custodie franciscaine racontent que la méfiance et le ressentiment mutuel entre Israéliens et Arabes sont devenus démesurés, avec des relations sociales de plus en plus tendues, voire interrompues. Pensons par exemple aux mesures gouvernementales particulièrement pénalisantes pour les travailleurs chrétiens qui passaient chaque jour d’une partie de la Terre Sainte à une autre. Cette menace de pauvreté pour certains secteurs s’ajoute à celle, plus générale, causée par le manque de pèlerins et de visiteurs, ce qui a mis à genoux le secteur du tourisme, l’une des principales sources de travail pour de nombreuses familles chrétiennes. Il y a ensuite les milliers de chrétiens de la ville de Gaza, latins et schismatiques grecs compris (ils représentaient avant la guerre 0,05% de la population de la bande de Gaza), qui ont été déplacés depuis octobre dans les structures des deux communautés et qui ont vu leurs maisons bombardées, restant sans aucune perspective d’emploi pour ceux qui parviennent à survivre.

L’avenir des chrétiens en Terre Sainte

Il Maccabeo : En conclusion, quel est l’horizon de résolution de la crise actuelle le plus conforme à la doctrine catholique et à la liberté des chrétiens en Terre Sainte ? Bref, vers quelles intentions devons-nous diriger nos prières et, le cas échéant, quelles perspectives pratiques devons-nous espérer ?

Abbé Carandino : Au cours des siècles passés, les catholiques de Terre Sainte, bien qu’écrasés par la domination musulmane, d’abord arabe puis turque, ont toujours trouvé une aide constante et significative de la part de la chrétienté, qui a favorisé le travail séculaire de la Custodie franciscaine pour la défense des communautés locales et des pèlerins. C’est ce qui manque aujourd’hui, et ce qui manquait en 1917 : non plus des nations catholiques déterminées à sauvegarder la présence chrétienne en Terre Sainte, voire à la faire prospérer le plus possible, mais plutôt des nations apostates englouties dans les sables mouvants de la laïcité, sans aucune intention d’offenser les nouveaux maîtres de la Palestine, et donc insensibles au sort des communautés chrétiennes.

Je vais vous donner un exemple : les gouvernements d’Italie, d’Espagne, de France et de Belgique entretiennent une relation diplomatique particulière avec la Custodie, qui se réduit cependant à de simples actes de présence à certains événements et réceptions. De la part des institutions italiennes, je ne vois aucune intervention pour revendiquer ce que le pape Pie XII demandait avec force et clarté depuis 1948 (et qui est théoriquement encore la position officielle du Saint-Siège), à ​​savoir un statut international pour Jérusalem, capable de garantir la liberté des Lieux Saints et par conséquent la reconnaissance des droits fondamentaux aux chrétiens locaux. A ces omissions s’ajoutent des intentions regrettables : malheureusement, les plus jeunes générations de la classe politique traitent des questions particulièrement complexes et délicates avec une superficialité désarmante, faisant primer l’illusion d’un avantage politique éphémère plutôt que de contribuer à une résolution judicieuse et durable des bouleversements politiques et sociaux qui troublent la Terre Sainte depuis des décennies. L’hypothèse d’un renversement de la structure diplomatique et politique en déplaçant les ambassades de Jérusalem, avancée par certains hommes politiques italiens, en est l’exemple le plus clair et le plus alarmant. Il ne semble donc pas que la solution puisse venir des chancelleries, où se trouvent des hommes d’État incompétents, bien en-dessous des devoirs exigés par leurs fonctions et soumis aux plus forts.

Saint Pie X (Pape de 1903 à 1914) et Théodore Herzl (1860-1904), un des père du sionisme. Lors d’une visite de Herzl au Vatican en 1904, Saint Pie X refusa catégoriquement de soutenir le mouvement sioniste, parce que les Juifs ont refusé de reconnaître Jésus-Christ.

Quant au Vatican, je me souviens des paroles que m’a dites un prêtre cet été en Galilée. C’était un vétéran des pèlerinages, et il jugeait sévèrement ce qu’il considérait comme une politique de prudence excessive de la part du Saint-Siège. En ce sens, je crois que le dialogue interreligieux judéo-chrétien, qui a atteint des niveaux incroyables dans les années 1980 avec Jean-Paul II, n’a pas contribué à l’exercice digne et fructueux de la diplomatie vaticane. J’ouvre une parenthèse pour souligner comment l’esprit missionnaire, même face à une réalité difficile, ne doit pas abandonner l’espoir de conversion à la vraie Foi en la Très Sainte Trinité de tous ceux qui n’ont pas la grâce du Baptême, puisque seul le baume de la grâce sanctifiante peut transformer les hommes et préparer une saine transformation de la société israélienne et palestinienne.

Parue en 2022, cette anthologie rassemble la totalité des discours, homélies, interviews et textes officiels de Jean-Paul II, qui évoquent la question des relations avec le Judaïsme. La couverture nous montre Jean-Paul II face au mur des lamentations, le 26 mars 2000. Parmi les hérésies défendues par Jean-Paul II, on retrouve l’idée selon laquelle l’ancienne alliance avec le peuple juif n’aurait pas été révoquée. Ainsi, les juifs ayant refusé Jésus-Christ pourrait se sauver sans se convertir: L’apostolat de St Paul était donc inutile ?

Revenant à notre discussion, il semble donc qu’il n’y ait, humainement parlant, aucune perspective d’une structure sociale pacifique et équilibrée dans la Terre choisie par Dieu pour l’œuvre de la Rédemption. Les événements qui ont éclaté début octobre dernier ont rendu la situation générale encore plus dure, et l’actualité dramatique concernant la population civile confirme cette perspective, avec le risque réel que le conflit puisse affecter l’ensemble du Proche-Orient.

Cependant, les affaires humaines sont toujours soumises à la Divine Providence, qui peut faire échouer les projets humains de manière inattendue. Nos prières sont donc nécessaires pour demander et obtenir cette intervention divine. Après tout, c’est précisément sur cette terre que nous sommes passés miraculeusement du Vendredi Saint au Dimanche de la Résurrection. Il est évident que la prière doit être la conséquence d’une plus grande attention du public sur le sort de la présence chrétienne en Terre Sainte, actuellement ignorée par les médias.

Prière à Marie Reine de la Palestine

Pour conclure, en paraphrasant les paroles de Pie XI (« Pax Christi in Regno Christi« ), ne nous lassons pas de demander la paix du Christ dans la terre du Christ, à travers l’intercession de Marie Reine de la Palestine, Titre significatif qui fut choisi par l’ancien Patriarche de Jérusalem, Mgr Louis Barlassina, pour consacrer en 1920 le Patriarcat latin de Jérusalem à la sainte Vierge :

Icône de Marie Reine de la Palestine

O Marie Immaculée, gracieuse Reine du Ciel et de la Terre, nous voici prosternés devant votre trône, pleins de confiance en votre bonté et votre puissance infinies. Nous vous supplions de tourner votre regard compatissant vers la Palestine qui, plus que tout autre contrée vous appartient, car vous l’avez comblée de grâces par votre naissance, par vos vertus et par vos douleurs. Et c’est d’elle que vous avez donné au monde le Rédempteur.
Souvenez-vous aussi que c’est là que vous êtes devenue notre tendre Mère et la dispensatrice des grâces. Aussi, veillez sur votre patrie terrestre et protégez-la tout particulièrement, dissipez les ténèbres de l’erreur afin qu’y resplendisse le Soleil de la Justice éternelle, et faites que s’accomplisse la promesse sortie des lèvres de votre divin Fils de former un unique troupeau sous un seul pasteur. Et, à nous tous, obtenez de servir le Seigneur dans la sainteté et la justice tous les jours de notre vie, afin que par les mérites de Jésus et votre aide maternelle, nous puissions au terme de notre vie passer de cette Jérusalem terrestre aux splendeurs de la Jérusalem céleste. Amen.

Saint Louis-Marie Grignon de Monfort (1673-1716): sa vie, son héritage, sa spiritualité

Le 28 avril est un grand jour pour les dévots de Marie. C’est la fête de saint Louis-Marie Grignon de Monfort (1673-1716). Voici un résumé de sa vie, de son héritage, et de sa spiritualité.

Le jeune Louis-Marie

Saint Louis-Marie Grignon de Monfort est né à Montfort-sur-Meu, tout proche de Rennes, le 31 janvier 1673. Il fait son entrée au collège des jésuites Saint Thomas Becket de Rennes à 12 ans : son obéissance, son intelligence et sa charité rayonnent. Aîné d’une fratrie de huit enfants (dont un fils se fit dominicain et trois filles devinrent religieuses), Louis-Marie n’était pas destiné au sacerdoce par son père, qui s’opposa violemment à sa vocation au départ. Néanmoins, en écoutant les récits d’un prêtre local, l’abbé Julien Bellier, sur sa vie de missionnaire itinérant, il fut enflammé de zèle pour prêcher des missions.

La consécration à Marie et le séminaire

À 19 ans, il se consacre entièrement à Marie en faisant le vœu de tout lui confier et de ne jamais plus rien posséder en propre. Il se dira désormais « Louis-Marie de Monfort, esclave indigne de Jésus en Marie ». Il rejoint ensuite Paris à pied en 1693, puis entre au séminaire de Saint-Sulpice en 1695. Son séjour à Saint-Sulpice lui donne l’occasion d’étudier la plupart des ouvrages disponibles sur la spiritualité et, en particulier, sur la place de Marie dans la vie chrétienne, surtout après sa nomination en tant que bibliothécaire. Il a également eu le temps de développer des compétences de catéchiste, notamment auprès de la jeunesse désœuvrée de la paroisse Saint-Sulpice.

Les Filles de la Sagesse

Ordonné prêtre en juin 1700, il célèbre sa première Messe à l’autel de la Sainte Vierge de l’église Saint-Sulpice, puis devient aumônier de l’hôpital général de Poitiers en 1701, avant d’en prendre la direction en 1703. Cette même année, il fonde avec Marie-Louise Trichet la Congrégation des Filles de la Sagesse. La règle de la Congrégation s’exprime en ces termes, montrant que la Croix est au cœur de la spiritualité monfortaine: « La Congrégation de la Sagesse est particulièrement chargée de montrer Jésus-Christ au monde, comme la Sagesse de Dieu, Sagesse qui, par les douleurs, l’indigence, et la folie de la croix, est venue combattre la sagesse orgueilleuse du monde, son estime des richesses et son amour du plaisir« . Avant Vatican II, ces religieuses étaient répandues tout autour du globe, avec trois objectifs principaux, toujours selon la Règle : « 1° l’instruction et l’éducation de la jeunesse ; 2° le soin des pauvres et des malades ; 3° le renouvellement des âmes dans les retraites« . Aujourd’hui, les Filles de la Sagesse de la Maison Sainte-Anne, installée au lieu-dit Saint-Maurice, à 17 km du lieu natal de saint Louis-Marie, forment une communauté restée entièrement fidèle à l’esprit montfortain. Elles expliquent par ailleurs avec raison qu’elles sont « dociles au Magistère des légitimes successeurs de saint Pierre et refusent de suivre la doctrine et les réformes qui ont ravagé l’Église depuis Vatican II ». Vous en apprendrez plus sur leurs activités en visitant ce très bon site.

St Louis-Marie donne l’habit à Mère Marie-Louise

Les missions dans l’Ouest et l’influence contre-révolutionnaire

Entre 1705 et 1716, saint Louis-Marie se consacre à sa vocation de missionnaire dans l’Ouest de la France (Poitou, Bretagne, Anjou, Rochelle), en donnant plus de 200 missions. Il fut rapidement éprouvé par la Croix. Son grand succès a attiré la jalousie d’une partie du clergé, et au début du carême 1706, il lui fut interdit de prêcher davantage de missions dans le diocèse de Poitiers. Il décida donc de partir faire un pèlerinage à Rome, pour demander au Saint-Père, le pape Clément XI, ce qu’il devait faire. Le Pape reconnut sa véritable vocation et, lui disant qu’il y avait de la place pour son apostolat en France et que cet apostolat était même nécessaire, le renvoya avec le titre de Missionnaire Apostolique. Il fut très vite connu à travers la région et au sein des foyers les plus modestes comme « le bon Père de Monfort ». L’impressionnant Calvaire de Pontchâteau, érigé en 1709 à son initiative et avec l’aide d’une foule nombreuse, est un signe admirable de son œuvre dans la région (cf. photo ci-dessous). A nouveau interdit temporairement et injustement de prêcher à cette époque, il approfondit le mystère de la participation au Sacrifice de la Croix et rédige un chef d’œuvre spirituel, la Lettre circulaire aux amis de la Croix.

Calvaire de Pontchâteau, Loire-Atlantique, 50 km au nord-ouest de Nantes

Saint Louis-Marie fonde officiellement la Compagnie de Marie en 1713, dans l’objectif de former des missionnaires pour évangéliser l’Ouest. Les Pères René Mulot (1683-1749) et Adrien Vatel ont fait partie de ses plus fidèles disciples, continuant son œuvre après sa mort. Le Père de Monfort est un grand artisan de l’attachement puissant de l’Ouest français au catholicisme, encore en partie aujourd’hui. C’est pour cela que l’histoire lui attribue une grande part dans la résistance farouche et courageuse à la Révolution française (1789) dans ces contrées (chouannerie, guerres de Vendée). En effet, l’évangélisation des diocèses de Luçon, La Rochelle, Angers et Nantes a permis d’affermir la foi et de faire fleurir une vie chrétienne solide parmi la population, ce qui sema les germes féconds d’une admirable fidélité au catholicisme sur plusieurs générations, et alimentera largement la résistance à la Révolution d’inspiration satanique (non serviam, le refus de Dieu). Les « Mulotins », nom donné aux missionnaires monfortains à partir du nom du Père René Mulot (supérieur de la Compagnie de Marie de 1722 à 1749), ont évangélisé la future Vendée militaire. Malgré leur petit nombre (4 en 1723, et jusqu’à 13 en 1749, sans jamais aller bien au-delà), les missions se succèdent sans interruption jusqu’à la Révolution : on n’en compte pas moins de soixante-dix à quatre-vingts par décennie sur l’ensemble de la région (soit environ 500 missions entre 1720 et 1789), surtout dans les campagnes (cf. carte ci-dessous).

Les notes prises par le Père Pierre-François Hacquet sont très instructives à cet égard. Il dirige de nombreuses missions entre 1740 et 1780 (il prêche dans 274 missions pendant cette période), et il recense les peuples qui ne sont pas réceptifs à la prédication des missionnaires. C’est notamment le cas du sud de la Vendée et des Deux-Sèvres, dont nous savons qu’elles ne prendront presque pas part à l’insurrection de mars 1793. A l’inverse, les lieux où le Père Hacquet trouve un peuple docile et fervent seront des terres d’insurrection contre-révolutionnaire. Il y a donc un lien direct entre succès des missions et terre d’insurrection.

Carte représentant les lieux de missions des « Mulotins », disciples de St. Louis-Marie

La persécution et le rappel à Dieu

Au fil des missions, saint Louis-Marie Grignon de Monfort est persécuté par les jansénistes, qui veulent empêcher son zèle de répandre le sang du sauveur par le cœur de Marie. Il subit trois tentatives d’assassinat et un empoisonnement, qui l’affaiblira jusqu’à sa mort. Sa vie est une vie de dénuement absolu, de persécution universelle et de don total à Dieu par Marie : il a bien fait toutes choses, sans jamais se plaindre. Son dicton : « PAS DE CROIX, QUELLE CROIX! » (réfléchissons-y…).

Lors de sa dernière mission à Saint-Laurent-sur-Sèvre (diocèse de La Rochelle), il rend son âme à Dieu le 28 avril 1716, à 43 ans, sous les coups de la maladie et de l’épuisement, en chantant paisiblement avec les fidèles qui l’assistaient : « Allons, mes chers amis, Allons en Paradis… » Louis-Marie a été béatifié par Léon XIII en 1888, puis canonisé par Pie XII en 1947.

La spiritualité monfortaine

La spiritualité monfortaine a deux piliers: 1) la Croix et 2) la sainte Vierge. Ces deux piliers s’unissent dans la notion de « saint esclavage de Jésus en Marie », par lequel on accepte de renoncer à tout en sacrifiant sa volonté propre en tout et en confiant tout ce que nous sommes, tout ce que nous avons et tout ce que nous faisons à Marie, en vue d’accomplir la volonté de Dieu. Saint-Louis-Marie Grignon de Monfort est l’auteur d’un grand classique de la vie spirituelle : le Traité de la vraie dévotion à la sainte Vierge. Cette œuvre n’a cependant été découverte et publiée qu’à partir de 1843 – soit plus d’un siècle après sa mort! -, participant grandement au renouveau extraordinaire de la piété mariale qui s’est observé dans la seconde moitié du XIXème siècle et le début du XXème.

St. Louis-Marie Grignon de Monfort en prière devant la sainte Vierge

Voilà l’essentiel de sa pensée sur Marie :
1. Pleine de grâce, elle est le trésor de Dieu. En la louant, on loue le chef d’œuvre de Dieu.
2. Elle a engendré le chef de l’Eglise, elle engendre aussi logiquement les membres, nous.
3. Jésus est venu par Marie. Il s’est incarné avec le consentement de Marie, il s’est fait connaître par Marie, il a fait son premier miracle par Marie, il s’est donné sur la croix par Marie. Ainsi, nous devons de la même manière aller à Jésus par Marie, connaître Jésus par Marie, nous donner à Jésus par Marie. Dieu l’a voulu ainsi.
4. Marie est comme une « relation à Dieu ». Elle est toute relative à Dieu et fait tout pour Dieu et en vue de Dieu. Elle fait sa volonté en absolument tout, sans exception. En l’aimant, en apprenant d’elle et en moulant notre cœur sur le sien par une véritable dévotion à une si bonne mère, on est sûr de grandir en sainteté !

Prières quotidiennes

Prières traditionnelles du matin et du soir

Prière du matin

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit

Mettons-nous en la présence de Dieu et adorons-le

Très sainte et très auguste Trinité, Dieu unique en trois personnes, je crois que vous êtes ici présent. Je vous adore avec les sentiments de l’humilité la plus profonde, et je vous rends de tout mon coeur les hommages qui sont dus à votre souveraine Majesté.

Acte de Foi

Mon Dieu, je crois fermement toutes les vérités que vous avez révélées, et que vous nous enseignez par votre Église, parce que vous ne pouvez ni vous tromper, ni nous tromper.

Acte d’Espérance

Mon Dieu, j’espère, avec une ferme confiance, que vous me donnerez, par les mérites de Jésus-Christ, votre grâce en ce monde, et si j’observe vos commandements, le bonheur éternel dans l’autre, parce que vous l’avez promis, et que vous êtes fidèle dans vos promesses.

Acte de Charité

Mon Dieu, je vous aime de tout mon cœur, et par-dessus toutes choses, parce que vous êtes infiniment bon et infiniment aimable, et j’aime mon prochain comme moi-même pour l’amour de vous.

Remercions Dieu des grâces qu’il nous a faites et offrons-nous à lui

Mon Dieu, je vous remercie très humblement de toutes les grâces que vous m’avez faites jusqu’ici. c’est encore par un effet de votre bonté que je vois ce jour ; je veux aussi l’employer uniquement a vous servir. je vous en consacre toutes les pensées, les paroles, les actions et les peines. bénissez-les, seigneur, afin qu’il n’y en ait aucune qui ne soit animée de votre amour, et qui ne tende à votre plus grande gloire.

Formons la résolution d’éviter le péché et de pratiquer la vertu

Adorable Jésus, divin modèle de la perfection à laquelle nous devons aspirer, je vais m’appliquer autant que je le pourrai, à me rendre semblable à vous : doux, humble, obéissant, chaste, zélé, patient, charitable et résigné comme vous ; et je ferai particulièrement tous mes efforts, pour ne pas retomber aujourd’hui, dans les fautes que je commets si souvent, et dont je souhaite sincèrement me corriger.

Demandons à Dieu les grâces qui nous sont nécessaires

Mon Dieu, vous connaissez ma faiblesse. Je ne puis rien sans le secours de votre grâce. Ne me la refusez pas, Ô mon Dieu, proportionnez-la à mes besoins ; donnez-moi assez de force, pour éviter tout le mal que vous défendez, pour pratiquer tout le bien que vous attendez de moi, et pour souffrir patiemment toutes les peines qu’il vous plaira de m’envoyer.

Invoquons la sainte Vierge, saint Joseph, notre bon Ange et notre saint
Patron

Sainte Vierge, Mère de Dieu, ma Mère et ma Patronne, je me mets sous votre protection, et je mets toute ma confiance en votre miséricorde. Soyez, ô Mère de bonté, mon refuge dans mes besoins, ma consolation, dans mes peines, et mon avocate auprès de votre adorable Fils, aujourd’hui, tous les jours de ma vie, et particulièrement à l’heure de ma mort.

Très saint patriarche saint Joseph, par cette sollicitude pleine d’amour avec laquelle vous vous êtes occupé en ce monde de Jésus et de Marie, daignez veiller sur notre existence jusqu’au dernier soupir.

Ange du ciel, mon fidèle et charitable guide, obtenez-moi d’être si docile à vos inspirations, et de régler si bien mes pas, que je ne m’écarte en rien de la voie des commandements de mon Dieu.

Grand Saint, dont j’ai l’honneur de porter le nom, protégez-moi, priez pour moi, afin que je puisse servir Dieu, comme vous, sur la terre, et le glorifier éternellement avec vous dans le ciel.
Ainsi soit-il !


Prière du soir

Mettons-nous en la présence de Dieu et adorons-le

Je vous adore, ô mon Dieu, avec la soumission que m’inspire la présence de votre souveraine grandeur. Je crois en vous, parce que vous êtes la vérité même.
J’espère en vous, parce que vous êtes infiniment bon. Je vous aime de tout mon coeur, parce que vous êtes souverainement aimable; et j’aime mon prochain comme moi-même pour l’amour de vous.

Remercions Dieu des grâces qu’il nous a faites

Quelles actions de grâces vous rendrai-je, ô mon Dieu, pour tous les biens que j’ai reçus de vous? Vous avez songé à moi de toute éternité; vous m’avez tiré du néant, vous avez donné votre vie pour me racheter, et vous me comblez encore tous les jours d’une infinité de faveurs. Hélas! Seigneur, que puis-je faire en reconnaissance de tant de bontés? Joignez-vous à moi, Esprits bienheureux, pour louer le Dieu des miséricordes, qui ne cesse de faire du bien à la plus
indigne et la plus ingrate de ses créatures.

Demandons à Dieu de connaître nos péchés

Source éternelle de lumière, Esprit-Saint, dissipez les ténèbres qui me cachent la laideur et la malice du péché. Faites-m’en concevoir une si grande horreur, ô mon Dieu, que je le haïsse, s’il se peut, autant que vous le haïssez vous-même, et que je ne craigne rien tant que de le commettre à l’avenir.

Examinons notre conscience sur les péchés commis pendant cette journée,
envers Dieu, envers le prochain et envers nous-mêmes… en pensées… en
paroles… en actions… en omissions…
Demandons pardon à Dieu de nos péchés

Me voici, Seigneur, tout couvert de confusion, et pénétré de douleur à la vue de mes fautes. Je viens les détester devant vous, avec un vrai déplaisir d’avoir offensé un Dieu si bon, si aimable et si digne d’être aimé. Était-ce donc là, ô mon Dieu, ce que vous deviez attendre de ma reconnaissance, après m’avoir aimé jusqu’à répandre votre sang pour moi ? Oui, Seigneur, j’ai poussé trop loin mon ingratitude. Je vous en demande très humblement pardon, et je vous conjure, ô mon Dieu, par cette même bonté dont j’ai ressenti tant de fois les effets, de
m’accorder la grâce d’en faire, dès aujourd’hui, et jusqu’à la mort, une sincère pénitence.

Prenons une ferme résolution de ne plus pécher

Que je souhaiterais, ô mon Dieu, de ne vous avoir jamais offensé! Mais, puisque j’ai été assez malheureux pour vous déplaire, je vais vous marquer mon repentir, par une conduite meilleure que celle que j’ai gardée jusqu’ici. Je renonce, dès à présent, au péché et à l’occasion du péché, surtout de celui où j’ai la faiblesse de retomber plus souvent. Et si vous daignez m’accorder votre grâce, ainsi que je la demande et que je l’espère, je tâcherai de remplir fidèlement mes devoirs, et rien ne sera capable de m’arrêter, quand il s’agira de vous servir. Ainsi soit-il.
Notre Père, Je vous salue Marie, Je crois en Dieu, Je confesse à Dieu.

Recommandons-nous à Dieu, à la sainte Vierge et aux Saints

Bénissez, ô mon Dieu, le repos que je vais prendre, pour réparer mes forces, afin de vous mieux servir. Vierge sainte, Mère de mon Dieu, et après lui ma plus ferme espérance, saint Joseph, mon bon ange, mon saint patron, intercédez pour moi, protégez-moi pendant cette nuit, tout le temps de ma vie, et à l’heure de ma mort. Ainsi soit-il.

Prions pour les vivants et pour les fidèles trépassés

Répandez, Seigneur, vos bénédictions sur mes parents, mes bienfaiteurs, mes amis et mes ennemis. Protégez tous ceux que vous m’avez donnés pour supérieurs, tant spirituels que temporels. Secourez les pauvres, les prisonniers, les affligés, les voyageurs, les malades et les agonisants. Convertissez les hérétiques, et éclairez les infidèles.
Dieu de bonté et de miséricorde, ayez aussi pitié des âmes des fidèles qui sont dans le purgatoire, spécialement de celles pour lesquelles je suis obligé de prier. Donnez-leur le repos et la lumière éternelle. Ainsi soit-il.

Prière à tous les saints

Âmes très heureuses, qui avez eu le bonheur de parvenir à la gloire, obtenez-moi deux choses de celui qui est notre Dieu et notre Père : que je ne l’offense jamais mortellement, et qu’il ôte de moi tout ce qui lui déplaît. Ainsi soit-il.

Prière : Pourquoi et comment prier

Sommaire
· Pourquoi prier
— Prier pour se sauver
— Prier pour adorer
— Prier pour remercier
— Prier pour demander pardon
— Prier pour obtenir une grâce temporelle
— Prier pour les autres
· Comment bien prier
· Prières quotidiennes


Celui qui prie se sauve certainement, celui qui ne prie pas se damne certainement.

Saint Alphonse de Liguori
Saint Thérèse de l'Enfant Jésus tenant un chapelet

En 1927, le Pape Pie XI proclame la petite Sainte Thérèse de Lisieux, qui n’a jamais quitté son Carmel, sainte patronne des missions catholiques, au même titre que Saint François Xavier qui a parcouru le monde entier pour prêcher et baptiser. Qu’a-donc bien pu faire la petite Thérèse pour être associée aussi étroitement à l’effort missionnaire par le chef de l’Église ? Du fond de son couvent, elle a prié : par sa prière, elle a converti des âmes, elle a obtenu pour les missionnaires des secours et des forces précieux sans lesquels ils n’auraient pas pu avoir de ministère fructueux et confesser la foi jusqu’au martyre. Par ce patronage entre autres choses, l’Église nous enseigne la puissance de la prière : une prière fervente, bien faite, peut faire pleuvoir sur nous et sur le monde entier de grandes grâces.


Prier pour se sauver

Il est impossible de sauver son âme sans recevoir de Dieu une aide particulière, des grâces actuelles tout au long de notre vie : pour vaincre l’inclination au mal, fuir les occasion de péché, garder la foi, pratiquer toutes les vertus jusqu’à l’héroïsme si les circonstances l’exigent. Cela es impossible par nos propres forces : celui qui se repose sur ses propres forces, se croyant par nature suffisamment fort pour se garder du mal et faire le bien en toutes circonstances, ne tardera pas à chuter, et à chuter gravement. Plusieurs ont commencé de se convertir, ont un temps voulu quitter leurs voies mauvaises et suivre l’enseignement de l’Église, puis se sont lassés en chemin et sont revenus dans l’obscurité et les vices d’où ils avaient voulu sortir : on peut le dire certainement, c’est faute d’avoir suffisamment prié, ou faute d’avoir suffisamment bien prié. Ce secours de Dieu absolument nécessaire au salut, Dieu ne l’accorde qu’à ceux qui le prien avec attention et persévérance. Étant données ces deux grandes vérités : – On ne peut pas s sauver sans le secours de Dieu, – Dieu ne donne son secours qu’à ceux qui le demandent ave persévérance, La première attention et la première occupation du chrétien, après les devoirs d son état proprement dit, doit être de prier Dieu, pour son salut et pour toutes les autres fins de la prière (dont nous parlerons ensuite). Dans les familles vraiment chrétiennes, la prière es présente à tous les moments de la vie. Pour ceux qui viennent d’un monde où l’on ne prie plus, où la prière est considérée même par ceux qui se disent catholiques comme quelque chose d’ennuyeux et de bizarre, la première chose à laquelle ils doivent veiller au moment de se convertir est, après l’abandon du péché mortel et des occasions prochaines de celui-ci, l’édification d’une véritable «vie de prière», c’est le «carburant» nécessaire à la vie spirituelle, la nourriture sans laquelle on finit par chuter et mourir de faiblesse.

Il vaut mieux prier peu et prier bien, que prier beaucoup avec négligence et sans attention. Il vaut mieux prier peu mais prier chaque jour avec régularité, quelles que soient les difficultés qu’on y trouve, que de négliger de prier habituellement et de faire beaucoup de prières dans un moment de ferveur qui ne sera que passager. C’est parce que nous avons besoin chaque jour du secours de Dieu qu’il faut prier chaque jour. C’est parce que Dieu récompense la fidélité et l persévérance qu’il faut prier avec régularité.

Si vous venez ou revenez depuis peu à la foi catholique, nous vous conseillons de commencer doucement, pour être sûr de bien tenir. Il est aussi plus bénéfique de bien prier plutôt que de prier beaucoup mais en étant distrait.

Chapelet

Les neuvaines

Qu’est-ce qu’une neuvaine

Comment réciter une neuvaine

Exemples de neuvaines

« Veillez et priez pour ne pas entrer en tentation » (Mt 26, 41).

« Demandez et l’on vous donnera » (Mt 7, 7).

« Il faut tenir comme de foi, que la prière est nécessaire aux adultes pour leur salut, ainsi qu’il ressort des Saintes Ecritures, parce que la prière est le moyen sans lequel on ne peut obtenir le secours nécessaire au salut »

Sans le secours de la grâce nous ne pouvons faire aucun bien : « Hors de moi vous ne pouvez rien faire » (Jn 15, 5).

Prières de l’Église
Les litanies majeures

Les marques de la véritable Eglise

Visibilité et marques de la véritable Eglise

Notions générales

La visibilité

Nous venons de voir que Jésus-Christ, pour continuer son oeuvre, avait fonder une, et une seule société enseignement visible. Non seulement en ce sens que les membres sont des êtres visibles; mais que la société, comme telle, est constituée par des liens visibles (visibilité de la société, comme société). Ces liens sont au nombre de trois principaux: 1° la profession extérieure de la foi, 2° l’obéissance aux pasteurs légitimes, 3° la participation aux sacrements. Cependant, cela ne suffit pas évidemment pour reconnaître la véritable Eglise, fondée par Jésus, il faut aussi que son caractère d’Eglise du Christ soit visible, reconnaissable. Il faut qu’elle soit visible en tant que société du Christ, fondée par le Christ.

Les trois sortes de visibilité ont été voulues par le Christ pour son Eglise. C’est déjà par les deux premières. Notre-Seigneur a voulu des membres visibles (Il parle de troupeau, famille, etc.). Il a voulu aussi des liens sociaux visibles: les sacrements, rites sensibles extérieurs; la profession de la foi: « Celui qui aura cru et aura été baptisé, sera sauvé. » (Marc, XVI, 16). Or, cette foi, pour amener au baptême, doit être évidemment extérieurement professée; Enfin, l’obéissance extérieure aux chefs: « Si quelqu’un n’obéit pas à l’Eglise, qu’il soit regardé comme un païen et un publicain. » Pour la visibilité en tant que véritable Eglise du Christ, Notre-Seigneur l’a voulu aussi: il oblige, sous peine de damnation, à entrer en son Eglise, à pratiquer sa religion, à obéir aux lois de l’Eglise du Christ. Cela est de nécessité de moyen pour le salut: qui ne croira pas, sera condamné (Marc, XVI, 16); qui n’obéira pas, doit être regardé comme un païen. or, pour cela, il faut bien que l’Eglise du Christ soit reconnaissable, comme telle, visible en tant que société du Christ. Autrement, on ne peut être obligé d’y croire, d’y entrer, de lui obéir. Aussi, pour cela, Il donne à son Eglise des « marques » ou « notes » distinctives. Il dit par exemple: « Soyez ‘un » comme mon Père, et moi, nous sommes « un » » (Jean XVII, 21), « Aimez-vous les uns les autres. A cela on reconnaîtra que vous êtes mes disciples. » (Jean XIII, 34-35). Que faut-il donc entendre par ces marques, ou notes, de la véritable Eglise de Jésus-Christ?

Les marques

On appelle marques ou notes des propriétés visibles en elles-mêmes, qui prouvent et montrent que telle société est l’Eglise fondée par le Christ, c’est-à-dire la rendent visible et reconnaissable en tant qu’Eglise du Christ, et permettent de la distinguer des fausses religions.

Les marques sont de deux sortes:

1° Les marques négatives, dont l’absence montre la fausseté de la société, par exemple: une société ayant une doctrine immorale qui permet l’homicide, ou tout autre crime ne sera pas la vraie Eglise du Christ. Et l’on arrive à la vraie Eglise du Christ par élimination des fausses. Il peut, d’ailleurs, y avoir un grand nombre de notes négatives.

2° Les marques positives, dont la présence montre directement la vérité de telle société, d’après la volonté et les paroles de Notre-Seigneur. On le voit aisément, cette méthode est plus directe et plus rapide: quand on a découvert la vraie Eglise du Christ, il est facile d’éliminer les autres, puisqu’il ne peut y en avoir qu’une.

Pour avoir une note positive, il faut avoir une propriété:

1° essentielle et inhérente à la société qu’il s’agit de montrer, c’est-à-dire, qui soit contenue dans la nature de cette société; c’est, en effet, une des caractères d’une marque, à la différence des miracles ou des signes extérieurs: un miracle s’ajoute à la doctrine qu’il démontre; une marque, au contraire, fait partie de la société qu’elle rend visible.

2° intrinsèquement visible, perceptible par elle-même, plus visible que la chose à démontrer, c’est-à-dire que la vérité de telle société comme Eglise du Christ. La marque diffère ainsi des simple propriétés, comme l’infaillibilité, qui peuvent être propres et essentielles à l’Eglise du Christ, mais ne sont pas extérieurement discernables (et surtout naturellement démontrable en soi puisque c’est une connaissance surnaturelle révélée).

3° Exclusive, c’est-à-dire, ne pouvant appartenir qu’à une seule société, à l’exclusion des autres; soit à cause de la volonté même et de l’institution du Christ, qui l’a déterminée une fois pour toutes; soit par son caractère miraculeux, qui en fait un apanage d’une seule société, Dieu ne pouvant en soutenir qu’un de façon miraculeuse.

Les notes de l’Eglise

Il y a quatre marques ou notes principales de l’Eglise; elles ont été énoncées et présentées comme telles par le Concile de Nicée-Constantinople, dans la rédaction de son symbole (IVe siècle).

Trois sont exclusives par leur caractère miraculeux donné par Jésus: l’unité, la catholicité, la sainteté; la quatrième est exclusive de par la volonté du Christ; et en elle-même, ne peut appartenir qu’à une société: c’est l’apostolicité. Elle présente, d’ailleurs, par le fait de la stabilité qu’elle suppose et entraîne, un aspect miraculeux.

Nous étudierons avant tout chaque marque comme note positive et nous examinerons successivement la volonté du Christ, c’est-à-dire ce que Notre-Seigneur a voulu pour son Eglise; la société où elle se trouve réalisée, en commençant par l’Eglise romaine, à laquelle nous avons le bonheur d’appartenir, et qui possède ces marques comme Notre-Seigneur les a voulues; puis on peut voir, comme confirmation que les autres sociétés ne possèdent pas ces marques: c’est alors l’étude de la marque envisagée comme négative.

Statue de Saint Pierre, Basilique Saint-Pierre de Rome

L’Unité

L’unité voulue par Jésus-Christ

Notre-Seigneur a voulu que son Eglise:

1° Ait l’unité, comme marque distinctive: « Qu’il n’y ait qu’un seul troupeau, un seul pasteur. Que tous soient un, comme mon Père et moi sommes un.« .

Cette unité se manifeste dans la doctrine: « Qu’ils soient un pour que tous croient que vous m’avez envoyé, ô mon Père. », « Une seule foi« , dira saint Paul. Cette unité doit être assurée par le magistère infaillible de saint Pierre: « Celui qui ne croira pas sera condamné » et ne fera plus partie de l’Eglise.

L’unité se manifeste aussi dans le gouvernement avec pouvoir législatif et judiciaire ayant pour tête l’apôtre saint Pierre. « Un seul pasteur; sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise. Pais (toi seul) mes agneaux (fidèles) et aussi, mes brebis (pasteurs secondaires) ». Sans cette soumission, on n’est plus de son Eglise, on est comme un païen, un publicain.

Cette unité est aussi une unité de moyens de sanctification: un seul pouvoir d’ordre, et les mêmes sacrements: « Faites ceci en mémoire de moi.« 

2° présente grâce à son unité les caractères d’une marque positive, car elle est un propriété:

a) essentielle et inhérente à la société, c’est la société qui doit être une: doctrine, gouvernement et moyens de sanctification sont les éléments constitutifs de l’Eglise.

b) visible en elle-même: on peut constater aisément cette uniformité d’enseignement, de croyances et de lois.

c) qui, par son caractère miraculeux, ne peut appartenir qu’à une seule société et lui est exclusivement propre.

En effet, cette unité voulue par Notre-Seigneur est un miracle moral, car c’est une unité catholique (universelle): entre les hommes de nations, de caractère, de condition, de sexe, d’âges différents et dispersés par toute la terre: « Allez, enseignez toutes les nations. » Or, on sait combien il est difficile de s’entendre sur des questions aussi importantes que les questions religieuse entre gens de temps, de pays et d’esprits si différents. Dans l’antiquité, chaque religion était nationale, le culte des dieux particuliers étant un élément de la patrie. Comment amener tous ces hommes de tous les temps et de tous les lieux à croire les mêmes vérités, à pratiquer les mêmes devoir et le même culte?

C’est aussi une unité surnaturelle, et non quelconque: « Soyez un comme mon Père et moi sommes un. » Son modèle est donc l’unité même des personnes divines, ce qui est au-dessus des lois ordinaires de la nature morale.

Elle est dans l’Eglise Romaine

L’Eglise romaine, c’est-à-dire la société dont le chef visible est le Pape, évêque de Rome, est en possession de cette marque. Elle possède l’unité voulue par Notre-Seigneur:

1° Unité de foi, conservée par le magistère infaillible. Et cela en tout temps et en tous lieux, non par immobilité routinière, mais dans un développement normal et sans contradiction, comme celui de l’organisme qui grandit ou de la graine qui devient un grand arbre. Cette unité a été conservée malgré les obstacles et les erreurs provenant des impies et des hérétiques, que l’Eglise a toujours rejetés de son sein.

2° Unité de gouvernement: autorité suprême unique du Pontife romain sur les divers diocèses et ordres religieux. Qui ne s’y soumet pas s’exclut par le fait même de l’Eglise.

3° Unité de sacrements et de moyens de sanctification: même pouvoir d’ordre; tout ce qu’il y a d’essentiel dans l’administration des sacrements, le saint sacrifice de la messe, le culte des saints, est commun aux divers liturgies adaptées aux divers temps et lieux; c’est une unité précise et sûre dans une riche variété. Là encore, qui ne s’y soumet pas est exclu de droit.

Cette unité est une marque positive, car elle est visible, inhérente et miraculeuse: une unité aussi parfaite dans une société catholique qui enseigne une doctrine mystérieuse des préceptes difficiles est au-dessus des forces de la nature.

Elle n’est pas dans les autres sociétés

En fait, l’Eglise romaine, seule, possède cette unité. Les autres sociétés ne l’ont pas. Il est, en effet, deux groupes de sectes qui disent aussi venir du Christ: les sociétés protestantes et grecques orthodoxes.

Les églises protestantes

Ces sociétés ne possèdent:

1° Ni l’unité de gouvernement: pas de chef unique, toutes sont indépendantes, les unes des autres; quelques-unes ont même supprimé toute hiérarchie et rejettent l’épiscopat.

2° Ni l’unité de doctrine, à laquelle s’oppose directement le principe du libre examen. Si Bossuet vivait encore, il pourrait rechercher et trouver à l’infini des « variations » entre les multiples sectes: luthériennes, calvinistes, anglicanes, entre leurs branches innombrables et même à l’intérieur de chaque branche.

3° Ni l’unité de culte, brisée par la même raison. On ne s’entend pas sur le nombre et les rites essentiels des sacrements, le saint sacrifice de la messe, et les autres pratiques cultuelles.

Les églises schismatiques orientales

Elles n’ont pas non plus:

1° L’unité de gouvernement puisqu’elles ne reconnaissent pas un chef unique et comprennent quinze ou seize groupes, ayant chacun son autonomie.

2° L’autorité doctrinale universellement reconnue qui puisse interpréter de façon uniforme les dogmes acceptés par toutes et venant des sept premiers conciles œcuméniques o universels (conciles qu’ils jugent légitimes en général). L’existence de ces conciles généraux, seule autorité admise par ces églises, est rendue impossible pour elles en raison de leur séparation même d’avec l’Eglise romaine.

3° Les moyens nécessaires (l’autorité unique et universelle) pour conserver au culte son uniformité essentielle, même si l’unité de culte peut accidentellement perdurer grâce à ce qu’ils ont pu plus ou moins conserver de l’Eglise catholique.

On constate donc que l’Eglise Romaine possède, et possède seule, l’unité voulue par Notre-Seigneur, et, de ce fait, est la seule véritable Eglise de Jésus-Christ.

La Catholicité

Catholicité veut dire universalité. Pour une société, c’est la diffusion dans tout le monde: c’est un grand nombre de fidèles d’une multitude de nations. La catholicité suppose l’unité (il faut que ce soit la même société qui soit répandue), mais elle en diffère: unité dit cohésion, et catholicité dit expansion, diffusion.

Il faut distinguer plusieurs sortes de catholicités:

1° La catholicité de droit ou qualitative: aptitude à s’adapter à tous les temps, pays, climats, âges, mœurs, etc.; force d’expansion de la société.

2° La catholicité de fait ou réelle: diffusion partout en fait. Cette diffusion est absolue, si la société existe dans toutes les provinces absolument et toujours; elle est relative physiquement, si la société est répandue dans toutes les régions connues à chaque époque; elle relative moralement, si elle existe dans un nombre suffisant de régions connues à chaque époque pour pouvoir représenter l’univers entier.

La catholicité voulue par Jésus-Christ

Notre-Seigneur a voulu que son Eglise soit catholique de droit et de fait. On le prouve:

1° Par les paroles, actes, promesses de Notre-Seigneur: « Enseignez toutes les nations (toute créature) jusqu’aux extrémités de la terre. » Il fonde une seule religion, obligatoire pour tous les hommes. Donc, Il veut bien qu’elle se répande partout.

2° Cela correspond au caractère universel donné à l’Eglise par les prophéties faites sur Notre-Seigneur, et qu’il affirme être venu accomplir.

3° Cependant, il n’a pas voulu une catholicité nécessairement absolue, mais une diffusion progressive. Il compare son Eglise au levain, qui, « peu à peu« , fait fermenter toute la masse; au grain de sénevé (Marc, IV, 31), qui, « petit à petit« , germe et devient un arbre, où viennent se réfugier tous les oiseaux du ciel. Il est facile, d’ailleurs, de voir cette progression dans la parole de Notre-Seigneur: « Vous serez témoins à Jérusalem, en Judée, en Samarie et dans le monde entier. » (Actes, I, 8)

4° Il n’a pas voulu non plus, une catholicité physique (puisqu’il laisse le soin de cette diffusion à la liberté humaine, toujours faillible, et dont les moyens sont limités), mais une catholicité relative et morale; diffusion dans un nombre suffisant de régions assez différentes et nombreuses pour représenter l’ensemble du monde connu à chaque époque.

Cette catholicité réalise toutes les conditions nécessaires pour être une marque positive. En effet, elle est:

1° Essentielle et inhérente à l’Eglise du Christ: c’est sa société, qui doit être universellement répandue.

2° Visible au plus haut degré: on constate aisément où une religion est répandue.

3° Propre à l’Eglise du Christ et à elle seule: cette Eglise, par son caractère universel, en face des tendances nationales et particularistes, qui sont bien le mode constant d’agir des hommes en matière religieuse, doit constituer un perpétuel miracle moral.

Elle est dans l’Eglise Romaine

L’Eglise Romaine possède la catholicité, marque positive, en droit et en fait:

1° Catholicité de droit: par sa doctrine, sa constitution, sa morale, elle exclut l’individualisme et est au-dessus du nationalisme; elle peut s’adapter à toutes les races, à tous les temps, à tous les milieux, à tous les pays; les faits eux-mêmes ont prouvé cette possibilité.

2° Catholicité de fait progressive, relative, morale, ce que prouvent: la propagation rapide des premiers siècles « jusqu’aux extrémités de la terre » (Saint Paul), « partout » (Saint Marc, Tertullien); l’existence permanent des missions catholiques dans les diverses parties du monde, à mesure que des nouveaux pays sont découverts et abordables (le fait que cette permanence ait eu lieu suffit [en Amérique au XVIe siècle, en Afrique et en Asie au XIXe et XXe], même si elle n’est plus présente en acte à telle ou telle période de l’histoire comme aujourd’hui par exemple); le nom caractéristique de « catholique », toujours possédé par elle, sans contestation.

Cette catholicité est une marque positive et exclusive. C’est un miracle moral:

1° Pour le prouver, on pourrait d’abord se servir des mêmes arguments que pour la propagation et la conservation du christianisme: il n’y a pas proportion entre les moyens employés et les obstacles à cette diffusion universelle d’une religion mystérieuse et austère.

2° La difficulté, et donc le miracle, augmentent encore si cette diffusion s’étend à des pays, des époques et des milieux très divers. Cette capacité d’adaptation et cette adaptation réelle sans déformation constituent un miracle hors pair. Et, à ce titre, elles ne peuvent appartenir qu’à une seule société, pour laquelle Dieu s’engage ainsi. Donc, l’Eglise catholique possède la catholicité telle qu’elle a été voulue par Notre-Seigneur comme marque positive. Donc, elle est la véritable Eglise du Christ.

Elle n’est pas dans les autres société

Si l’on envisage le point de vue négatif, on constate qu’au contraire les autres sociétés: sectes protestantes, églises orthodoxes, n’ont pas la catholicité:

1° Les multiples fractions du protestantisme ne peuvent y prétendre, car leur multiplicité même et leur désunion les en empêche. Chacune d’elles occupe un ou quelques pays, ici c’est l’une qui est répandue, ailleurs, c’est l’autre. Ce n’est pas la même religion, la même société. Là où il n’y a pas unité, la catholicité est impossible.

2° Les mêmes remarques sont à faire pour les églises orientales; il faut même ajouter que leur ardeur missionnaire est à peu près nulle et que chacune reste confinée dans la partie de l’Orient où elle existe déjà.

Donc seule, l’Eglise Romaine possède la catholicité voulue par Jésus-Christ. Seule, elle est donc sa véritable Eglise.

La Sainteté

Dieu est la sainteté même, c’est-à-dire Il a sa volonté inviolablement fixée en l’amour souverain du Bien, qui est lui-même, et la haine du péché. La sainteté est donc l’union à Dieu: amour et pratique du bien, haine et fuite du mal. L’hommes est saint dans la mesure où il réalise cette union avec Dieu.

Une chose est sainte 1° soit quand elle a un rapport de sainteté avec une personne, comme moyen de sanctification; 2° soit quand elle a appartenu ou touché à une personne sainte (reliques); 3° soit quand elle la représente (images). Une société est dite sainte quand 1° elle sanctifie ses membres; 2° par des moyens efficaces.

Il y a des conditions pour que la sainteté constitue, au profit d’une société religieuse, une marque positive. Elle doit être:

1° Inhérente à la société en tant que groupement: la sainteté des membres comme personnes privées ne suffit pas. Il faut l’influence des principes appartenant à la société et rendant ses membres saints. Mais il n’est pas nécessaire que tous les adhérents soient saints.

2° Visible, soit comme sainteté de principes (lois, institutions, rites du culte, moyens de sanctification), soit comme sainteté des membres, manifestée par leurs actes.

3° Exclusive, ne pouvant appartenir qu’à une seule société, et cela par son caractère miraculeux: non pas sainteté ordinaire, quelconque, mais héroïque, enseignée et proposée par les principes, et surtout réalisée par les membres. Cette sainteté héroïque n’est pas autre chose que la pratique prolongée de toutes les vertus, ce qui, nous l’avons dit, constitue un miracle moral (voir Sainteté de Notre-Seigneur).

La sainteté voulue par Jésus

Notre-Seigneur a voulu que son Eglise ait la sainteté dans tous les domaines:

1° Sainteté des principes: Ceux qu’Il lui donne à répandre, spécialement dans le Sermon sur la montagne, constituent un Code parfait de sainteté, à la base duquel Il place la transformation intérieure, la lutte contre les passions (égoïsme, orgueil, jouissance), surtout l’amour de Dieu et du prochain, et l’accomplissement en toutes choses de la volonté divine. Il promet l’efficacité des moyens de sainteté, spécialement de la prière en son nom: « Tout ce que vous demanderez à mon Père en mon nom (dans les choses du salut, surtout), Il vous l’accordera. » (Jean, XIV, 13-14; Mt., XXI, 22).

2° Sainteté des membres: ceux qu’il désire dans son Eglise, et les seuls qu’Il récompensera par l’entrée au ciel, sont ceux qui font fructifier, par leurs efforts et les bonnes actions méritoires, les grâces reçues de Dieu (Parabole des talents, Mt., XXV, 14); ceux qui ont préféré le bon grain des vertus à l’ivraie des vices (Parabole de l’ivraie, Mt., XII, 24); ceux qui gardent leur âme revêtue de la robe nuptiale, symbole de pureté et de charité, c’est-à-dire de la grâce sanctifiante (Parabole des invités au festins, Mt., XXII, 1-14).

Or, cette sainteté constitue une marque positive, inhérente, visible et exclusive au sens indiqué ci-dessus. Il suffit de la considérer dans les principes et dans les membres pour voir qu’elle inclut l’héroïsme et suppose souvent le miracle:

1° Dans les principes: amour de Dieu par dessus tout, principe de tous les renoncements: « Celui qui aime son Père ou sa mère plus que moi, et ne renonce pas à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et ses sœurs, et même à sa propre vie, ne peut être mon disciple. » (Mt., X, 37). Mortification continuelle de soi-même, par la lutte contre les passions et les mauvaises tendances: « Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il porte sa croix tous les jours de sa vie. » (Luc, IX, 23). Ses disciples sont les pauvres, les purs, ceux qui souffrent persécution pour la justice, toutes choses dures à la nature. Il faut y ajouter quelques préceptes, par exemple, l’amour des ennemis, le pardon des injures, et, pour ceux qu’il y appelle spécialement, les conseils évangéliques: pauvreté, chasteté, obéissance complètes.

2° Dans les membres; leur sainteté doit être parfaite et surnaturelle. Ils doivent se rapprocher de la sainteté de Dieu: « Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait. Soyez un (unis à Dieu, et entre vous), comme mon Père et moi nous sommes un. » (Mt., V, 48). Il faut demeurer unis à Dieu, à Jésus, par la grâce sanctifiante, et s’y perfectionner: « Je suis le cep; vous êtes les branches. Demeurez en mon amour. » (Jean, XV, 5), « Sans moi, vous ne pouvez rien faire. » (Jean, XV, 5; car c’est d’une sainteté surnaturelle qu’il s’agit.), « Qu’ils soient un, ô Père, comme nous sommes un: moi en eux, et vous en moi; qu’ils soient consommés dans l’unité, pour que le monde sache que vous m’avez envoyé! » (Saint Jean, XVII, 23). Et saint Paul constate: « Le Christ se livre à Dieu comme Rédempteur, pour se donner une Eglise glorieuse, sans tâche, ni ride, une Eglise sainte et immaculée. » (Ephésiens, V, 27).

Elle se trouve dans l’Eglise Romaine

L’Eglise Romaine possède la sainteté, marque positive, c’est-à-dire la sainteté allant jusqu’au degré héroïque et miraculeux. Soit dans les principes:

1° L’idéal d’abord et la règle à suivre: doctrine élevée et qui dirige toute la morale; lois complètes et parfaites, fermes et précises; conseils. Tout le dogme et la morale traduisent exactement l’idéal de la perfection voulu par Jésus en son Eglise; tout tend à assurer la fuite du péché, la conservation de la vie divine, l’imitation de la sainteté de Jésus.

2° Et, pour y arriver, des moyens puissants sont mis à la disposition de tous: prière, sacrements, sont appropriés aux nécessités diverses de la vie surnaturelle; liturgie et culte rapprochent l’âme de Dieu et lui font puiser aux dogmes et aux mystères de Jésus les leçons de vertus et les grâces surnaturelles qu’ils contiennent.

3° Les multiples ordres religieux offrent aux âmes avides de perfection des voies qui mènent à toutes les forme d’abnégation et de dévouement.

Soit dans ses membres: fait absolument unique, à toutes les époques, sous tous les climats, dans toutes les conditions, elle a eu et elle a des saints à vertus héroïques, allant parfois jusqu’au martyre; elle a des saints à miracles: Saint Martin de Tours, Saint Augustin, Saint Bernard, Saint François d’Assise, Saint Vincent Ferrier, Sainte Thérèse, Saint François de Sales, Saint Vincent de Paul, Saint François Xavier, et, plus près de nous, le Curé d’Ars, Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, Sainte Bernadette Soubirous, Padre Pio, et tant d’autres, ne sont que quelques anneaux de cette chaîne brillante et sans fin. La liste dressée à grand renforts de précautions et après plusieurs miracles, s’allonge toujours. C’est une des marques les plus éclatantes de la vitalité de l’Eglise romaine, de la valeur surnaturelle de ses principes et la preuve indubitable que Dieu est avec elle.

Mais, dit-on parfois, il y a des désordres et des désordres graves parfois dans l’Eglise romaine. Oui, cela arrive, mais le soin avec lequel les relèvent ses adversaires en montre le caractère relativement exceptionnel. D’ailleurs, ils se produisent non en suivant la morale de l’Eglise romaine, mais en s’en éloignant; on ne peut donc pas les lui imputer, car la sainteté et la vertu restent affaire de liberté et de générosité. Si l’examen des principes catholiques n’avait pas suffi, la sainteté héroïque d’une multitude de bienheureux, prouve assez leur efficacité: ces derniers, et non les autres, sont les témoins authentiques de ce que peut l’Eglise en matière de sainteté. L’Eglise Romaine possède donc la sainteté comme marque positive et absolue.

Les autres sociétés n’ont pas la sainteté voulue par Jésus

Si l’on procède maintenant par comparaison, on constate que, pour les autres sociétés, la sainteté joue comme marque négative. Evidemment, parmi leurs membres, il peut y avoir des âmes de bonne foi, qui mènent une vie honnête et atteignent un certain degré de vertu. Elles le peuvent par les grâces ordinaire, que Dieu ne leur refuse pas, et par certains principes que ces sectes ont en commun avec l’Eglise romaine et ont conservé d’elle au moment de leur séparation; c’est donc, en somme, à l’Eglise romaine que ces résultats doivent être attribués, et non aux sectes séparées, en ce qu’elles ont de propre et de caractéristique. Ce qui le montre bien d’ailleurs (et ceci est frappant), c’est:

1° Qu’aucune de ces sociétés ne peut revendiquer des saints à sainteté héroïque, comme l’Eglise romaine en a toujours produits partout et dans tous les siècles et en produit incessamment.

2° Et que, d’une façon générale, le niveau moral y est bien inférieur à celui de l’Eglise romaine: « On juge un arbre à ses fruits. » a dit Notre-Seigneur. les vrais fruits d’une société sanctificatrice, sont les grands saints, les saints héroïques, les saints à miracle [Peut-il y avoir des miracles en une secte chrétienne séparée? Peu, sans doute; cependant il ne semble pas impossible que Dieu fasse des miracles de pure bonté, en faveur d’âmes religieuses de bonne foi. Mais il leur manquera toujours la relation apologétique avec la doctrine de la secte en tant que spécifiquement distincte et propre: sans cette absence, Dieu ne ferait pas li miracle. Si le miracle a lieu, il met plutôt en valeur ce que la société séparée possède encore de spécifiquement chrétien, c’est-à-dire de commun avec l’Eglise romaine.]. Nous en trouvons beaucoup dans l’Eglise romaine, mais nous n’en voyons :

a) ni dans les sectes protestantes, dont les dogmes, d’ailleurs, sont destructeurs de toute morale (foi sans les œuvres, négation de la liberté) et dont les fondateurs, Luther, Calvin, et Henri VIII, ont été loin d’être des saints.

b) ni dans les églises orthodoxes, grecques ou russes, car, depuis la séparation, elles n’ont pas produit des saints héroïques et n’ont pu manifester la sainteté de leurs principes propres. Les listes mises parfois en avant par elles ont été constituées sans aucun procès canonique ni aucun contrôle et ne présentent pas de saints comparables à ceux de l’Eglise Romaine.

Donc, l’Eglise Romaine, possédant seule la sainteté, voulue par Jésus, est la véritable Eglise du Christ.

L’Apostolicité

Apostolicité veut dire relation avec les Apôtres. Or, une société peut posséder cette relation à divers titres: 1° par le temps, si elle est née au temps des Apôtres; 2° par le lieu, si elle se trouve en un lieu occupé par eux; 3° par la doctrine, si elle enseigne la même doctrine qu’eux; 4° par le pouvoir d’ordre, si ses ministres donnent les mêmes sacrements en vertu du même pouvoir d’ordre qui s’est transmis depuis les apôtres; 5° par l’origine, si c’est véritablement la même société que celle fondée par eux (continuité du groupement); 6° enfin, par le gouvernement, si elle est gouvernée par leurs successeurs.

Il est normal que la société du Christ ait, comme marque distinctive une relation étroite avec les Apôtres du Christ. Mais laquelle de ce liaisons est une note positive?

1° Les quatre premières sortes ne sont que des indications. Il est aisé de le comprendre, car la communauté de temps et de lieu peut exister pour bien des groupements sans qu’aucune relation plus étroite en découle. Avoir, dans l’ensemble, la même doctrine et les mêmes sacrements, tout en indiquant une parenté plus définie, peut être le fait de plusieurs sociétés. Or, Notre-Seigneur et les Apôtres n’en ont constitué qu’une, et une marque positive doit en désigner une seule. Ces sortes de relations ne suffisent donc pas.

2° En revanche, l’apostolicité d’origine et celle de gouvernement nous apparaissent comme: a) inhérentes et essentielles à la constitution même de la société; b) visibles et constatables, par la succession constante des chefs, et l’obéissance des membres; c) possédant aussi une véritable exclusivité. Si Jésus a désigné cette marque et si telle société est celle des Apôtres, nulle autre ne l’est, puisque Jésus n’a fondé qu’un Eglise.

La volonté de Jésus-Christ

Notre-Seigneur Jésus-Christ a voulu:

1° Que son Eglise possède l’apostolicité d’origine. Il a dit à ses Apôtres: « Je suis avec vous jusqu’à la consommation des siècles. » (Mt., XXVIII, 20). Donc, il veut la continuité, l’indéfectibilité, de l’Eglise dont les apôtres, auditeurs de cette parole, étaient les chefs. Ce sont toujours eux qui qui existeront jusqu’à la fin du monde, vivant dans leur société et leurs successeurs; et Jésus, étant avec cette Eglise, sera avec eux. D’ailleurs, les apôtres le comprirent ainsi, et se choisirent des successeurs, qui devaient continuer leur personnalité morale, être d’autres « eux-mêmes » et faire continuer la même société.

2° Que son Eglise ait l’apostolicité du gouvernement, c’est-à-dire continuité dans la succession des pasteurs. Cette apostolicité, on vient de la voir, est le moyen nécessaire pour la précédente et se prouve par la même parole: « Je suis avec vous« , c’est-à-dire: « La société dont vos successeurs seront les chefs, sera la mienne jusqu’à la fin des siècles. » D’ailleurs, la raison montrait la nécessité de cette marque. Pour savoir clairement que telle Eglise avait reçu sa mission de Jésus-Christ et des apôtres, il n’est pas de meilleure façon que de voir la continuité de la société et la suite de ses chefs depuis les apôtres.

Comment sera assurée cette succession ininterrompue? Par la continuité dans les successeurs du chef des Apôtres: Saint Pierre, transmettant aux chefs secondaires des pouvoirs apostoliques. Ainsi la continuité et l’indéfectibilité dans la succession doivent être assurées par la continuité et l’indéfectibilité des successeurs de Saint Pierre: « Confirme tes frères. Pais mes agneaux, pais mes brebis. » Et, de cette façon, tous les chefs de l’Eglise seront les successeurs du collège des apôtres unis à Saint Pierre.

3° Or, cette double apostolicité, voulue par Notre-Seigneur pour son Eglise, constitue une marque positive, essentielle, visible et propre à la seule société du Christ. Jésus dit clairement: « Qui vous écoute (vous, et vos successeurs, continuant votre personnalité), m’écoute; qui vous méprise, me méprise. » (Luc, X, 16). Son Eglise ne peut donc être que celle des Apôtres et de leurs successeurs (avec la même doctrine essentielle, la même mission, la même structure, le même culte etc.).

L’Eglise Romaine possède l’apostolicité, marque positive

Elle possède l’apostolicité d’origine. Cette société est la même que celle dirigée par les apôtres. On le prouve par l’Histoire, qui en démontre la continuité et l’identité:

1° Elle posséda toujours, sans conteste, le même nom, Eglise catholique romaine;

2° Il est impossible de nommer quelqu’un qui l’eût séparée de l’Eglise du Christ;

3° Au contraire, on suit son histoire continue au cours des dix-neuf siècles écoulés.

Elle possède l’apostolicité de gouvernement. C’est par elle qu’on peut constater plus facilement encore l’apostolicité d’origine.

1° La succession ininterrompue des deux cent soixante et un papes (de saint Pierre à Pie XII), successeurs de Saint Pierre sur le siège de Rome est notoire. Elle est prouvée par les témoignages les plus anciens, et unanimes: Tertullien, saint Irénée, Caius, saint Ignace, saint Clément.

2° D’ailleurs, le siège du Souverain Pontife romain a toujours porté, sans contestation, le nom du Siège Apostolique. Le fait de cette succession est tellement historique que tous, Grecs et Latins, l’admettent. Et les obscurités de la période dite « du grand schisme d’Occident » ou de la vacance formelle du siège apostolique depuis Vatican II qui est due à l’infiltration moderniste dans l’Eglise ne nuisent pas plus à l’apostolicité de l’Eglise Romaine qu’à son unité. Car, concernant le grand schisme (1378-1417), parmi les deux ou trois prétendants, l’un était certainement le véritable successeur de Saint Pierre, dont les pouvoirs se transmirent ainsi au Pape de l’Eglise de nouveau unifiée. Et dans les diverses obédiences (où se rencontrèrent également saints et miracles), on voyait, en celui qu’on regardait comme pape, non pas sa personnalité propre, mais l’unique successeur du Prince des Apôtres. D’un côté, il pouvait y avoir erreur personnelle, mais il restait l’unité formelle: « Ubi Petrus, ibi Ecclesia. »

Même si il n’y avait eu aucune obédience légitime [hypothèse envisagée par le grand théologien enseignant à la Grégorienne Timotheus Zapelena dans son De Ecclesia Christi], c’est-à-dire une vacance formelle du siège apostolique [autrement dit, l’absence d’autorité pontificale en acte], l’apostolicité et la continuité visible de l’Eglise n’aurait pas été affectées. Elles auraient résidé dans la continuité morale d’un corps électoral [corps électoral légitime sur le fondement d’un titre coloré, c’est-à-dire, sur la base de la reconnaissance au moins juridique et factuel du statut de cardinal de ses membres, même à défaut de statut réel: la suppléance de Dieu agissant pour la continuité de son Eglise] capable de désigner à tout moment un successeur de saint Pierre. Il faut donc toujours que le successeur de saint Pierre existe en puissance [qu’il puisse être élu à tout moment par une élection canonique légitime] pour ne pas nuire à l’apostolicité, il n’est pas absolument nécessaire qu’il existe toujours en acte [qu’il y ait un pape légitime qui exerce effectivement sa charge de pasteur en enseignant, gouvernant et sanctifiant les âmes]. C’est aussi ce que le cardinal Cajetan appelle la « puissance ministériellement élective » ou saint Antonin de Florence et le R.P Guérard des Lauriers (et bien d’autres, dont le même Cajetan, le cardinal Bellarmin etc.) « l’aspect matériel de la papauté ». Ainsi dans la crise actuelle de l’autorité dans l’Eglise, les données du sens commun, de la foi et du raisonnement logique nous montrent qu’il n’y a pas de Pape en acte car les occupants du Saint-Siège ont un défaut d’intention objective d’accomplir la mission de l’Eglise. Ce défaut d’intention objectif [indépendamment de leur bonne volonté, c’est une question d’acte extérieur et d’efficacité objective] se manifeste par une défection générale dans l’exercice de leur charge [ils enseignent des erreurs condamnées par l’Eglise, se conduisent habituellement de manière scandaleuse, ils font des lois qui permettent le mal, ils promulguent un culte non catholique, ils ont causé une désertion des églises en laissant le modernisme s’enraciné dans tous les diocèses du monde et en en faisant la promotion etc.], défection évidemment incompatible avec la sainteté, l’unité et l’apostolicité de l’Eglise. En revanche, parce qu’il n’ont jamais été personnellement condamnés par aucune autorité légitime [comme ont pu l’être les protestants ou les schismatiques], qu’il n’ont fait aucune déclaration explicite de séparation de l’Eglise romaine [comme l’ont fait les protestants ou les schismatiques], leur élection ne peut, jusqu’à preuve du contraire, qu’être considéré comme canoniquement légitime. Ils sont élus pour recevoir l’autorité mais font obstacle à sa réception et ne sont donc pas papes. En revanche, il existe à tout moment la possibilité pour qu’il le redevienne en acte ou qu’un nouvel élu le soit en acte. Pour cela, il faudrait que l’élu se convertisse réellement en reniant toutes les erreurs depuis Vatican II et en se disposant objectivement à exercer ce pour quoi le pontificat est fait [enseigner la vérité en continuité et en conformité avec les apôtres, leurs successeurs et Jésus-Christ; condamner les erreurs; promouvoir le vrai culte et les vrais sacrements etc.]. En attendant, la continuité morale et la « puissance ministériellement élective » est suffisante pour sauver l’apostolicité. Comme c’est le cas en période de vacance habituelle entre deux pontificats ou comme ce put être le cas, selon l’avis de Zapelena, durant le « grand schisme d’Occident ». Quand à savoir si les électeurs actuels sont légitimes [étant donné qu’ils ne sont pas cardinaux et que la plupart sont des modernistes qui ne professent pas la foi catholique], nous pouvons dire [comme durant le grand schisme: Zapelena admet que de nombreux cardinaux créés par des obédiences illégitimes ont eu le droit et le pouvoir de voter pour élire Martin V en 1417. Cela malgré le fait d’être de faux cardinaux] qu’ils le sont en raison de leur titre coloré qui est le fondement d’une suppléance divine de juridiction répondant à une exigence absolue: fournir un élu potentiellement capable de recevoir l’autorité pontificale.Cette permanence de la faculté de désigner demeure aussi en eux car aucune sanction légale ne leur a enlevé. C’est peut-être triste, mais n’oublions pas que la réalité l’est souvent: c’est une vallée de larmes…

3° Cette apostolicité est, de par la volonté du Christ et en elle-même, une note positive. De plus, la stabilité du siège de Rome, malgré toutes les tempêtes et les difficultés, présente un caractère exceptionnel qui vient renforcer le caractère exclusif de l’apostolicité; elle constitue, en effet, un véritable miracle moral.

Les autres sociétés n’ont pas l’apostolicité

D’ailleurs, par comparaison, l’Eglise Romaine est bien la seule qui soit celle des apôtres. En effet, pour les autres, l’Histoire nous apprend aisément le nom des novateurs qui les ont privés de la double apostolicité requise. Pour les grecs: Photius (IXe siècle), Michel Cérullaire (XIe siècle). Pour les protestants: Luther, Calvin, Zwingle, Henri VIII.

1° En effet, ils ont séparé ces chrétiens de l’Eglise du Christ et des apôtres. Donc, ce n’est plus la même société, c’en est une nouvelle qui commence: pas d’apostolicité d’origine.

2° Ils ont ainsi commencé une autre succession de pasteurs qui ne puisent plus leur pouvoir de juridiction à la source apostolique représentée par le successeur de Saint Pierre, et dont ils se séparent. Donc, plus d’apostolicité de gouvernement. D’ailleurs, certains protestants (non épiscopaliens) vont plus loin, et rejettent tout épiscopat, donc toute possibilité de succession apostolique.

Donc, l’Eglise Romaine, possédant et possédant seule les quatre marques positives voulues par Jésus, est la seule vraie Eglise du Christ. Les quatre marques ou notes contribuent, si on les réunit, à nous donner comme le visage de l’Eglise et son portrait. Elles s’unissent d’ailleurs en un groupement harmonieux, dont l’unité surnaturelle est pour ainsi dire le foyer: « Qu’ils soient un, comme Nous sommes Un! » 1° Unité avec Dieu: c’est la Sainteté; 2° Unité entre tous les hommes: Catholicité; 3° Unité avec les Apôtres: Apostolicité; 4° Unité enfin avec la hiérarchie actuelle, dans son triple domaine: c’est la marque d’Unité proprement dite.

Les preuves de l’institution de l’Eglise

Jésus-Christ a fondé une Eglise

Les deux conceptions sur la règle de la foi se retrouvent ici. Quel est le moyen de conserver, propager, expliquer, la doctrine instituée de fait par Jésus-Christ?

Les uns (protestants ou héritiers de l’individualisme moderne) disent: un moyen purement intérieur, individuel;

Les autres (catholiques), conformément aux documents historiques de l’Évangile et à la tradition, disent: une autorité visible et sociale.

Jésus-Christ a institué lui-même, réellement, une Eglise, société hiérarchique visible

La raison le montre

Ce que Jésus devait faire, il l’a fait certainement. L’institution d’une société religieuse était moralement nécessaire, nous l’avons vu, au bon succès définitif de la mission de Jésus. Or, Notre-Seigneur est Dieu, et possède toute lumière sur ce qui est utile ou nécessaire à l’avenir de son oeuvre. Donc il a institué une société religieuse visible.

Le texte évangélique le prouve

Cet argument basé sur les textes de l’Évangile (spécialement Saint Mattheiu XVI, 17, 20; XVIII, 18; XVIII, 18, 20; Saint Luc, XXII, 32; Saint Jean, XXI, 15), est tiré des paroles de Jésus:

1° à Saint Pierre:

« Tu es Pierre, et, sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise, et les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle. Je te donnerai les clefs du royaume des cieux. Tout ce que tu lieras sur la terre, sera lié dans le ciel. Tout ce que tu délieras sur la terre, sera délié dans le ciel. » (Mt. XVI, 18-20) « J’ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas, et toi, t’étant repenti, un jour, affermis tes frères. » (Luc, XXII, 32) « Pais, mes agneaux, pais mes brebis. » (Jn. XXI, 15)

La remise des clefs à saint-Pierre, Pérugin, 1482

2° aux apôtres unis à Saint Pierre:

« Tout ce que vous lierez sur la terre, sera lié dans le ciel; tout ce que vous délierez sur la terre, sera délié dans le ciel. » (Mt. XVIII, 18)

Selon tous ces textes concordants, Jésus promet d’abord (ce qui nous donne déjà une certitude absolue, puisque Jésus, Dieu, est sincère et puissant), puis Il réalise l’institution d’une société religieuse extérieure, visible, avec tous ses éléments énoncés.

Il en est le fondateur

« Je bâtirai mon Eglise« , « Je te donnerai les clés du royaume des cieux. », « Pais, mes agneaux, pais mes brebis. » Il en reste le chef invisible et indéfectible: « Je serai avec vous jusqu’à la consommation des siècles.« 

Ce qu’Il fonde, c’est une Eglise

En effet, c’est une collectivité visible d’êtres corporels, unis par les liens et extérieurs. On en trouve la preuve:

1° Dans les termes et comparaisons employés: royaume, famille, cité, filet plein de poissons; bercail, troupeau, maison; Eglise, c’est-à-dire société, réunion visible.

2° Par les liens qui unissent les membres de la société: pour y entrer, le rite visible du baptême, précédé d’une profession extérieure de foi (« celui qui croira, et sera baptisé » (Mc. XVI, 16)); dans la suite: participation aux mêmes biens (sacrements), et obéissance aux mêmes chefs visibles (« s’il n’écoute pas l’Eglise, qu’il soit comme un païen et un publicain » (Mt. XVIII, 17))

Il donne une autorité à cette société

A cette société, Il donne une autorité constitutive, des chefs, avec un rôle visible (« Désormais, tu seras pêcheurs d’hommes » (Luc, V, 10)). Ce sont les apôtres et leurs successeurs. Il choisit un chef suprême, qui paît les brebis (pasteurs secondaires) comme les agneaux (fidèles). Paître signifie diriger, guider, prendre soin, gouverner, donner au troupeau avec l’autorité du pasteur, tout ce qui lui est nécessaire:

« Tu es Pierre, et, sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise » (Mt., XVI, 18), c’est-à-dire: tu es le principe de la solidité de ma société. Or, dans une société, le principe de solidité est l’autorité, qui unit et dirige les volontés, vers le même but, pas les moyens adéquats.

« Je te donnerai les clés » (Mt., XVI, 19), c’est-à-dire: la puissance souveraine sur le royaume des cieux. Or, ce royaume des cieux, c’est l’Eglise de la terre, qui mène aux cieux, car, au ciel, il n’est pas besoin d’autorité autre que celle de Dieu.

A ces chefs, il donne les pouvoirs nécessaires pour une société de ce genre:

1° le Pouvoir d’enseignement pour éclairer les intelligences; à Pierre: « Affermis tes frères » (Luc, XXII, 32) puis à tous: « Allez, enseignez toutes les nations » (Mt., XXVIII, 19).

2° Pouvoir de gouvernement obligeant et guidant les volontés, qui doivent obéir sous peine de condamnation. A saint Pierre puis à tous (Mt., XVI, 19 puis XVIII, 18): « Tout ce que tu liera (commanderas) sera lié dans le ciel« , c’est-à-dire, obligera en conscience, devant Dieu, car l’obligation (ob-ligare) n’est pas autre chose qu’un lien de la conscience, le pouvoir capable d’imposer ce lien n’est autre que l’autorité, le gouvernement. A saint Pierre: « Pais mes agneaux, mes brebis » (Jean, XXI, 15), donne tout ce qui est nécessaire: pour cela, il faut pouvoir commander. De ce pouvoir de gouvernement découle le pouvoir de jugement: « Si quelqu’un n’obéit pas à l’Eglise, qu’il soit regardé comme un païen et un publicain.« 

3° Pouvoir d’ordre ou de sanctification: pouvoir d’administrer les sacrements, biens de l’Eglise et canaux de la grâce: « Baptisez au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit » (Mt., XXVIII, 19) et « Faites ceci en mémoire de moi. » (Luc, XXII, 19)

Le but de la société (salut et sanctification des membres, continuation de la mission du Christ) se poursuit par des moyens extérieurs et sociaux: participation aux sacrement, biens communs de la société.

Ces enseignements sont réunis, résumés comme en un testament, dans les dernières paroles de Notre-Seigneur, rapportées dans l’évangile de Saint Matthieu (XXVIII, 19, 20) et de Saint Jean (XX, 23):

« Tout pouvoir m’a été donné dans le ciel et sur la terre: Allez donc, instruisez toutes les nations (pouvoir d’enseignement). Baptisez-les, au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit (pouvoir d’ordre). Apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai prescrit (pouvoir de gouvernement). Les péchés seront remis à qui vous les remettrez (pouvoir de jugement et d’ordre). Voici que je suis avec vous, jusqu’à la fin du monde (perpétuité, infaillibilité). Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé (liens visibles).

Donc Jésus a voulu fonder, et a fondé une société religieuse, hiérarchique et visible: son Eglise.

L’histoire des premiers temps de l’Eglise prouve aussi l’institution de cette société

C’est elle, en effet, que nous voyons fonctionner des le christianisme primitif.

Les faits constatés

Cette société religieuse organisée (elle a toujours été la même dans son essence mais a connu des évolutions accidentelles au cours du temps: liées aux moyens disponibles, au développement extérieure de l’institution, à son influence etc.) apparaît, soit en Palestine, soit dans le monde païen, comme un corps social, distinct de la religion juive, et possédant:

1° Une hiérarchie visible: les chefs sous l’autorité de Pierre sont les apôtres et ceux qu’ils choisissent pour les aider et les suppléer; ils dirigent, commandent, gouvernent les volontés des nouveaux convertis, jugent et punissent les violateurs de la loi nouvelle (Actes, V, 1, 12) (II, Corinth., II).

2° Un pouvoir enseignant, qui se présente de façon catégorique et infaillible comme transmettant les paroles du Christ, que les apôtres imposent en intermédiaires authentiques: « Ils ne peuvent pas ne pas parler » (Actes, IV, 19, 21); concile de Jérusalem en 51 sur l’abandon des pratiques de la loi mosaïque auxquelles les anciens juifs étaient attachés.

3° Des rites extérieurs spécifiquement chrétiens, qui constituent l’entrée dans la société ou y assurent la vie cultuelle; le baptême [Saint Pierre lors d’un prédication à Jérusalem: Faites pénitence, et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ, pour la rémission de vos péchés ; et vous recevrez le don du Saint-Esprit (Actes, II, 38). Trois mille personnes environ furent baptisées ce jour-là (Actes, II, 41); Le diacre Philippe baptisa le ministre de Candace, reine d’Éthiopie, dans un cours d’eau (Actes, VIII, 36)], l’imposition des mains [C’est ainsi que firent Pierre et Jean avec les convertis de Samarie : ils … prièrent pour eux, afin qu’ils reçussent l’Esprit-Saint : car il n’était encore descendu sur aucun d’eux, mais ils avaient été seulement baptisés au nom du Seigneur Jésus. Alors ils leur imposaient les mains, et ils recevaient l’Esprit-Saint (Actes VIII, 14-17). Saint Paul imposa les mains sur les baptisés d’Éphèse et l’Esprit-Saint vint sur eux ; et ils parlaient diverses langues et prophétisaient (Actes, XIX, 6)], les onctions, la fraction du pain ou Eucharistie. Or, tout ceci correspond à l’institution de Jésus lui-même et nous en est une nouvelle garantie.

La valeur de ces faits

En effet, il n’y a pas eu d’interruption entre les ordres donnés par Jésus et l’établissement de cette société hiérarchique. Sans doute, l’Eglise n’est pas apparue d’un seul coup, toute faite pour ainsi dire et avec tous les rouages que nous lui connaissons aujourd’hui (d’un point de vue humain, extérieur, institutionnel, dans l’exposition de plus en plus précise de la révélation etc.). Mais, aussitôt après le Pentecôte, les apôtres ont commencé à réaliser le plan dicté par Jésus, et l’ont réalisé dans ces lignes essentielles (les pouvoirs de gouvernement, d’enseignement, de sanctification, l’unité, la sainteté, l’apostolicité et la catholicité). Les Actes des apôtres sont la mise en oeuvre immédiate de l’Évangile.

Les témoins

Nous en avons d’ailleurs divers autres témoins, qui nous permettent de remonter jusqu’aux âges apostoliques:

IIe siècle (fin)

Saint Irénée montre dans le caractère hiérarchique de l’Eglise un fait notoire et incontestée, institué par Jésus et les apôtres. Il ne l’aurait pas pu si cette hiérarchie avait été de fondation récente: de nombreuses contestations se seraient élevées. Or saint Irénée était témoin pour Rome, l’Orient et la Gaule, et touchait par son maître, saint Polycarpe, disciple de Saint Jean, à l’époque primitive de l’Eglise.

IIe siècle (milieu)

Saint Polycarpe affirme, lui aussi, que les pasteurs sont les gardiens de la foi et les chefs de la hiérarchie. Divers autres auteurs affirment également: l’existence de chefs reconnus, évêques successeurs des apôtres (Hégésippe), le Pontife de Rome (Denys de Corinthe); et l’identité permanente dans la foi et les sacrements (Albercius).

IIe siècle (début)

Saint Ignace d’Antioche.

Ier siècle (fin)

Saint Clément de Rome, disciple immédiat de saint Pierre et de saint Paul. Tous deux (Ignace et Clément) montrent dans la société instituée par le Christ une hiérarchie gouvernant les églises pour garder la tradition, sous l’autorité universelle de l’Eglise de Rome.

Ainsi, l’Évangile et l’histoire coïncident très nettement sur le point qui nous intéresse: le Christ a donc institué une autorité sociale de magistère, de gouvernement et de sanctification des âmes: son Eglise.

Trois conséquences découlent de cette conclusion:

1° Jésus-Christ n’a institué qu’une seule Eglise, tout le prouve. Les paroles de Jésus et des apôtres sont formelle: « Il n’y a qu’un seul troupeau et qu’un seul pasteur. » (Jean, X, 16); « Une seule foi, un seul baptême, un seul corps. » (épître aux éphésiens, IV, 4, 5). L’homme, d’ailleurs, a un besoin absolu de cette unité. Pour lui, la diversité tuerait la certitude. Puisque, sur chaque point dogmatique et moral, il n’y a qu’une vérité, deux sociétés, naturellement distinctes en quelques points, ne peuvent venir également de Dieu.

2° Il y a une obligation stricte, de rechercher l’Eglise unique instituée par Jésus-Christ. L’indifférentisme religieux est donc à la fois illogique en lui-même; injurieux pour Dieu et Jésus, qui ont désigné un chemin à suivre; dangereux, et même gravement périlleux dans ses conséquences pour nous-mêmes. Nous devons donc et nous allons poursuivre nos recherches.

3° L’Eglise unique fondée par Jésus-Christ doit donc être reconnaissable à certaines marques; c’est ce que nous allons maintenant constater.

Pourquoi Jésus-Christ a fondé une Eglise ?

Problème à résoudre

La question à résoudre peut se formuler ainsi:

Quelle est, parmi les sociétés existant actuellement et se donnant comme chrétiennes, celle que Jésus-Christ a fondée, et à quoi peut-on la reconnaître?

Pour rechercher la véritable Eglise de Jésus-Christ, il faut étudier successivement son institution, ses marques distinctives et ses propriétés essentielles assignées par le Fondateur.

Institution de l’Eglise

Nous avons déjà démontrer que les Évangiles étaient authentiques et que Jésus-Christ était Dieu. Autrement dit, nous sommes désormais certains que Dieu s’est bien révélé et qu’il l’a fait par Jésus-Christ. Nous avons aussi vu tout ce qu’impliquait la divinité de Jésus-Christ, pour lui (nature et attributs) et pour nous (le suivre). Nous nous demanderons maintenant ce qu’a fait le Christ, pour mettre sa révélation à notre portée, à la portée de tous les hommes. Si sa sagesse divine Lui conseillait un moyen souverainement efficace, Il a dû évidemment le prendre; on peut constater ensuite s’il l’a pris en fait. Nous nous poserons donc successivement ces deux questions:

Jésus devait-il fonder dans ce but une société visible et enseignante?

En fait, l’a-t-il fondée?

Jésus-Christ devait fonder une Eglise

Sur ce terrain, une marche progressive s’impose. Deux affirmations sont à distinguer. La nécessité d’un secours quelconque pour conserver la révélation chrétienne et la nécessité morale d’un organisme social et d’une autorité visible. Nous reviendrons ensuite en détails sur chacune de ses affirmations.

Nécessité d’un secours quelconque pour conserver la révélation chrétienne

Un secours quelconque est nécessaire au genre humain, qui permette de conserver, de propager, d’expliquer, la doctrine révélée du Christ, de façon certaine, sans mélange d’erreurs, et pour tous.

Cette nécessité se prouve aisément par l’expérience: ceux qui ont voulu se livrer à leurs propres forces n’ont fait que se disperser en de multiples directions, et ont commis des erreurs nombreuses.

Elle trouve, d’ailleurs son explication 1° dans la nature des vérités révélées, qui sont d’ordre suprasensible, et parfois mystérieuses, donc plus difficiles à retenir et à interpréter; 2° dans la faiblesse des facultés humaines en face de vérités de ce genre; 3° dans les occupations et soucis matériels, qui absorbent un grand nombre d’hommes et les empêchent de se livrer à de longues études personnelles sur ces sujets religieux.

Un secours quelconque est donc nécessaire. Reste à déterminer quel genre est désirable.

Nécessité morale d’un organisme social et d’une autorité visible.

Il convient hautement à la sagesse divine que ce moyen soit une société visible et enseignante; et cette convenance est telle qu’elle équivaut en pratique à une nécessité morale. En face de cette assertion, se dressent les prétentions de l’individualisme moderne, d’origine protestante, et dont Rousseau a été l’un des principaux doctrinaires. D’après cette théorie, l’individu, qui a en lui-même sa fin, se suffirait en tout, sans aucun secours social.

Il est au contraire éminemment désirable et comme moralement nécessaire que le secours accordé aux hommes pour conserver la révélation, c’est-à-dire la règle prochaine de nos croyances, soit une société à magistère infaillible, une autorité doctrinale, vivante et ferme, chargée de conserver la vérité révélée, de la transmettre, et de l’expliquer.

Nécessité pour conserver et propager le christianisme

Jésus Christ devait, pour conserver les vérités de la révélation et les mettre à la portée de tous, prendre le meilleur moyen, le plus simple et le plus efficace : Il ne pouvait pas s’en désintéresser. Or nul moyen, on va le voir, n’est à la fois aussi simple et aussi puissant sur la nature humaine qu’une autorité enseignante sociale. (L’utilisation de verbe comme « devait » ou « ne pouvait pas » ne signifie nullement que Jésus-Christ était contraint par une quelconque force extérieure, comme si sa liberté pouvait être lésée. Ils indiquent simplement que comme Dieu, étant l’être et l’intelligence subsistance, la Sagesse même, tout ce qu’il fit ne pût qu’être parfait et conforme à sa propre sagesse. Le contraire aurait montrer un manque de liberté et donc aurait indiquer l’absence de la divinité. La liberté est la capacité de choisir le bien. Mal faire, c’est faire un mauvaise usage de la liberté qui indique un état de faiblesse et un certain degré de servitude : l’incapacité de faire le bien. Dieu étant la plénitude même du bien et étant entièrement indépendant, il ne saurait pâtir d’aucune servitude ni d’aucune faiblesse: il fait le bien de toute éternité avec la plus pure liberté. Jésus-Christ, en tant que Dieu, était entièrement libre et a fait usage de cette liberté en instituant l’Eglise de la manière la plus adéquate possible.)

La réunion en société constitue pour l’être humain:

1° Un besoin: L’homme est naturellement sociable; en vertu de sa nature sensible et intellectuelle, des moyens de communication avec ses semblables (paroles, sympathie, imitation, etc.) lui ont été donnés en ce but : faciliter les échanges de pensée, les associations d’intérêts, d’aspiration, d’idéal. Les philosophes païens les plus attentifs l’avaient déjà remarqué: Platon, Aristote, Cicéron. C’est pourquoi une forme sociale de religion est nécessaire à l’homme, et il convenait hautement que le moyen choisi par Jésus pour nous transmettre sa révélation fût une société.

2° Une condition de progrès et de stabilité dans tous les domaines (matériel, intellectuel et moral): sans société, l’individu laissé à ses seules forces devrait recommencer sans cesse les efforts opérés par ses prédécesseurs, et l’humanité piétinerait sur place; en société, au contraire, on s’aide, on se transmet les résultats; d’autres poursuivent plus loin les recherches et font de nouvelles découvertes, avançant ainsi dans le sentier tracé. Or, pour le genre d’activité, qui est le but principal de son existence (connaître et servir Dieu selon la révélation divine), l’homme ne saurait être privé d’un tel secours. Puisqu’il a besoin d’un secours, il est normal et sage qu’il jouisse sur ce terrain du moyen naturel et puissant de perfectionnement intellectuel et moral qu’est la société religieuse.

L’Eglise militante et l’Eglise triomphante, Andrea de Florence, 1365

Nécessité pour expliquer et interpréter les vérités révélées

Pour expliquer et interpréter les vérités révélées dans leur véritable sens, une autorité sociale et doctrinale est nécessaire. Le moyen que devait employer Jésus-Christ pour mettre en contact tous les hommes de tous les siècles avec les vérités révélées doit être une règle de foi:

1° sûre et complète, pour donner la sécurité nécessaire en matière de salut;

2° universelle et accessible à tous les temps et à tous les hommes, car c’est à tous que s’adresse la révélation chrétienne;

3° apte à clore et à juger les incertitudes et les controverses qui pourraient s’élever sur le sens de la révélation.

Or, deux moyens pouvaient être employés par Jésus pour nous faire parvenir sa révélation: des documents écrits, laissés à l’interprétation de chacun (car tout texte, l’expérience le prouve, a besoin d’être interprété); ou bien un enseignement authentique et vivant se perpétuant de siècle en siècle. Pouvait-il choisir l’un ou l’autre indifféremment?

Les églises protestantes prétendent que le premier moyen était suffisant et plus normal: la règle de foi serait l’Ecriture sainte seule, interprétée par le libre examen de chaque fidèle, disent les unes, avec l’inspiration du Saint-Esprit à chaque individu, disent les autres.

Les catholiques regardent ce moyen (l’Ecriture) comme insuffisant, et pensent qu’il fallait une autorité vivante et authentique: le magistère infaillible et traditionnel de l’Eglise.

Le système protestant

Il ne présente nullement les garantie les garanties suffisantes et les qualités ci-dessus requises. En effet, de soi, l’Ecriture est morte et demande, en bien des passages, à être interprétée pour retrouver la vrai pensée de l’auteur. Or, les moyens d’interprétation proposés sont illusoires et même dangereux.

I. Théoriquement:

1° Le libre examen en matière de religion détruit la certitude et l’unité de la doctrine. Les intelligences étant bornées et souvent dominées par les passions, chacun verra dans les textes difficiles, ou même dans les passages plus clairs, des sens multiples et contradictoires: l’expérience est là pour le prouver. Or, il n’y a pourtant qu’une même vérité sur un même point.

2° L’inspiration individuelle ne paraît pas convenir à la sagesse divine: Dieu n’a pas coutume, en effet, de multiplier les miracles quand un moyen plus simple (ici, une autorité sociale infaillible) est possible et aussi opérant. De plus, cette inspiration est condamnée par les faits, car le Saint-Esprit, s’il agissait ainsi, inspirerait évidemment la même chose à tous: or, nous savons qu’il y a autant d’interprétations protestantes que d’individus.

3° Même les deux moyens réunis (libre examen aidé par l’inspiration) ne sont ni à la portée de tous: il faudrait savoir lire, avoir le temps d’étudier en détail, de commenter; ni une règle sûre et complète: les protestants eux-mêmes admettent des vérités non contenues dans l’Ecriture; ni apte à clore les controverses: où serait l’autorité capable d’imposer une solution au libre examen ou à l’inspiration d’autres individus égaux, s’il y avait entre eux divergence ou même contradiction?

II. Pratiquement

De tels moyens d’interprétation engendrent:

1° Le fanatisme: on s’attache à son sens ou à celui qu’on se croit inspiré.

2° La corruption des mœurs: on cherche des sens qui légitiment les passions.

3° La libre pensée et l’indifférence en matière de religion: si plusieurs affirmations contradictoires peuvent être acceptées, cela met en défiance contre la vérité de toutes.

Le système catholique

Par Magistère infaillible et traditionnel, il faut entendre un organe de transmission et de tradition qui nous livre (tradere = livrer) les vérités révélées par Jésus; l’exercice d’une autorité sociale de d’enseignement infaillible et vivant, qui se présente à nous, au siècle où nous sommes, comme le représentant du Christ et l’interprète authentique de sa révélation. Or, ce moyen possède avec évidence les trois qualités énoncées ci-dessus.

Parce que infaillible et indéfectible, cette autorité sociale est sûre et complète quant aux vérités, et elle donne ainsi toute sécurité; universelle quant aux sujets à qui elle s’adresse; apte à clore efficacement et avec autorité toutes les difficulté d’interprétation qui peuvent s’élever, car cet organe, toujours vivant, présente de façon authentique la pensée même du Christ.

C’est donc un tel moyen que sa sagesse commandait au Christ de choisir.

Quelle est la véritable Eglise ?

Le lecteur ayant lu les sections apologétique précédentes avec honnêteté devrait être convaincu que :

  • Dieu existe
  • L’âme humaine est immortelle et sera récompensée ou punie par Dieu pour l’éternité après la mort
  • Jésus-Christ est Dieu

Par conséquent, la religion fondée par Jésus-Christ, Fils de Dieu, est divine, et donc, seule, révélation divine, à l’exclusion de toutes les autres religions. Il faut donc embrasser cette religion. Mais…

Mais, plusieurs groupements se disent chacun être la véritable religion de Jésus-Christ: Eglise catholique; églises protestantes et orientales; sectes diverses et prophètes plus ou moins farfelus. Il n’y en a pourtant qu’une seule qui soit vraie. En effet, elles différent toutes sur des points essentiels qui s’excluent mutuellement [par exemple, on ne peut pas soutenir en même temps que le Pape est le vicaire de Jésus-Christ et le chef de son Eglise à qui il faut obéir pour se sauver (les catholiques) et qu’il ne l’est pas (les protestants et les orientaux séparés de Rome). Ce serait dire que la réalité est contradictoire, ce qui est absurde. Ce serait faire la promotion d’une vision subjectiviste et relativiste des choses, théorie qui pose des problèmes importants (Voir La recherche de la vérité).]. Or il n’y a qu’une vérité sur chaque point et Notre-Seigneur n’a fondé qu’une seule religion.

Où est donc la véritable religion de Jésus-Christ? C’est ce qui nous reste à découvrir afin que chacun puisse être éclairé sur le véritable sens de sa vie, qu’il puisse en comprendre la destinée objective et se mettre à travailler pour l’accomplir. Il est vrai que l’existence d’une multitude de systèmes philosophiques et de courants religieux découragent nos contemporains. Ils sont parfois tentés d’abandonner les grandes questions de la vie sous prétexte que les réponses à ces questions ne sont ni connaissables ni unanimes. Pourtant, la multiplicité des conceptions subjectives n’atteint en rien l’unité de la réalité objective. La connaissance suppose en effet un objet extérieur à connaître et un sujet (un homme par exemple) qui le connaît. Sujet et objet sont distincts. Si la connaissance du sujet dépend entièrement de l’existence de l’objet duquel elle tire son contenu, l’inverse n’est pas vrai. La relation est asymétrique. L’objet existe antérieurement à la connaissance du sujet (il faut bien qu’une chose soit pour qu’on la connaisse ensuite) et indépendamment de cette connaissance. Si donc les conceptions sont multiples, c’est que les hommes qui appréhendent la réalité font des erreurs: leur connaissance n’est pas toujours conforme à son objet. Cela est dû aux mauvaises méthodes utilisées (car il faut bien raisonner pour trouver la vérité), aux défauts de la volonté (car il faut vouloir honnêtement trouver la vérité), à l’oubli de données importantes du réel (voir un aspect de la réalité et en oublier un autre), à des facteurs sociaux plus généraux (situation familiale, intérêts, mentalité, conformisme etc.) ou tout simplement à l’absence de l’objet à connaître (si par exemple un homme, sans faute de sa part, n’a jamais entendu parler d’une chose, il se trompe mais ne peut pas faire autrement étant donné l’absence d’objet à saisir). Par exemple: soit un groupe d’amis qui se perd en forêt alors qu’ils doivent rejoindre leur point de départ. Ils discutent et argumentent entre eux pour savoir quel chemin emprunter pour être de retour rapidement. Supposons que trois propositions s’affrontent. Ce n’est pas parce qu’il y a trois propositions que les trois sont vraies. En réalité, malgré la pluralité des propositions, une seule (ou aucune) est la bonne et permettra de rejoindre la but rapidement. De même pour un problème de mathématiques: le bon élève met son raisonnement sur papier et écrit la réponse puis rend sa copie au professeur. Evidemment, tout le monde n’est pas bon élève (cela se saurait…), la diversité des notes en témoignent. Le cancre, le mauvais élève ou l’élève travailleur mais peu doué, vont proposer une réponse à leur tout et rendre leur copie. Mais, qui prétendra que chacun a trouvé la solution alors qu’ils ont tous proposé des réponses différentes? Certainement pas le professeur qui connaît la vérité en ce sujet et qui corrigera les copies en conséquences. Nous voyons encore une fois que la réalité objective ne dépend pas des propositions subjectives apportées pour la mettre en lumière (ces propositions sont susceptibles d’être fausses, si elles ne correspondent pas à la réalité, ou vraies si elles sont conformes à leur objet) mais existe en elle-même. Il en est de même pour les conceptions religieuses. Ce n’est pas parce qu’il y en a de nombreuses qu’il n’existe pas de vraie religion. Il faut comme toujours mener un raisonnement correct et être de bonne volonté pour espérer la trouver.

Pour ce faire, nous examinerons quelles sont les marques ou notes distinctives et exclusives que Jésus-Christ a données à son Eglise en l’instituant. Ensuite, nous verrons quelle société réalise en effet ces marques et correspond bien à l’Eglise telle qu’elle a été instituée par Jésus-Christ.

Origine et sens du terme « Eglise »

La religion laissée par le Christ est désignée dans l’Évangile sous les noms de « royaume de Dieu« , « royaume des cieux« , ou encore « Eglise » (Saint Matthieu, chap. XVI et XVIII). C’est ce dernier terme qui a prévalu. Étudions-en les divers sens.

Sens étymologique

En grec, le mot « église », ekklêsia ( ἐκκλησία) signifie « assemblée par convocation » ou « assemblée« . Le latin « ecclesia » signifie aussi « assemblée« .

Sens biblique

Dans la Saint Ecriture, le mot « église » signifie « assemblée des fidèles; ensemble des fidèles d’une localité; société universelle des fidèles« .

Sens usuel

Le sens usuel selon lequel nous l’entendons ici, l’Eglise est la « Société des fidèles qui croient en Jésus-Christ« . On peut envisager cette société d’une façon plus ou moins étendue:

Au sens large, elle comprend tous les croyants: de l’Ancien et du Nouveau Testament; vivants (Eglise militante) ou disparus (Eglise souffrante au purgatoire, Eglise triomphante au paradis).

Au sens précis, on entends par là: 1° la société, c’est-à-dire l’union des volontés pour un même but, 2° des vivants, réunis par la professions d’une même foi en Jésus-Christ, et la participation aux mêmes biens spirituels, 3° sous l’autorité des chefs représentant le divin fondateur.

Les divers groupements chrétiens

Il est nécessaire de les caractériser brièvement avant d’entreprendre l’étude qui nous reste à faire. Trois confessions principales se présentent à nous avec des caractères historiques et intrinsèques (doctrine, culte, morale) assez nets pour que nous puissions les distinguer.

L’Eglise Catholique Romaine

Elle s’offre à nos regards comme une société solidement organisée dont l’unité dogmatique, morale et cultuelle est assurée par une autorité enseignante s’affirmant infaillible, exerçant dans le domaine disciplinaire une juridiction suprême. Ce Chef est l’évêque de Rome, qui, par ses innombrables prédécesseurs qui se sont succédé sans interruption (exerçant la même mission essentielle: la même doctrine, le même culte, la même morale en vue de la même fin qui est le salut des âmes et la gloire de Dieu), se rattache au Chef des Apôtres, Saint Pierre, et par lui au Christ.

La doctrine de Jésus, conservée et enseignée par l’Eglise Romaine, est exposée dans des symboles antiques, des conciles, des catéchismes et par d’autre moyens (pastorale, sermons etc.). Depuis vingt siècles, cette société vivace et active a produit et produit sans cesse des fruits de sainteté dans les diverses nations du monde connu à chaque époque; d’où son nom de catholique, c’est à dire universel.

Les églises protestantes ou réformées

Ces groupements affirment aussi remonter au Christ, mais en se dissociant au XVIème siècle de la société romaine sous l’influence de « réformateurs ».

Ces prétendus rénovateurs furent:

En Allemagne

Luther (1483-1546), moine apostat, orgueilleux, débauché et cruel (il suffit d’étudier sa vie et ses écrits honnêtement pour s’en convaincre: il n’y a qu’excès, mauvaise foi, haine et déséquilibre), qui prêcha une doctrine nouvelle et entraîna dans sa révolte une partie de l’Allemagne, grâce à l’appui des princes, spoliateurs de l’Eglise. Il se montra ouvertement hostile à l’Eglise Catholique Romaine par la publication de ses « 95 thèses » en 1517. En 1521, il fut, lui et ses disciples, expulsés du sein de l’Eglise Catholique Romaine.

En Suisse et en France

Zwingle (1484-1531) et Calvin (1509-1564), le premier curé dans le canton de Glaris, le second étudiant en droit, puis professeur de théologie à Genève, où il exerça la plus sanglante intransigeance en faisant condamner au feu ses contradicteurs et opprima tous les droits religieux et civils de la population. Il fût un véritable tyran capricieux et orgueilleux.

En Angleterre

Henri VIII (1491-1547), roi d’Angleterre de 1509 à sa mort, qui, n’ayant pu faire annuler son mariage par le Pape (il était marié à Catherine d’Aragon. Mais son caractère licencieux et frivole le poussa à prendre des maîtresses dans l’entourage de sa femme, dont Mary Boleyn. Puis, il s’attacha à la sœur de Mary, Anne Boleyn, pris la décision de l’épouser pour satisfaire ses désirs, puis finit par la mettre à mort…) sépara son royaume de l’unité romaine, en attendant que ses successeurs introduisent la doctrine protestante. Ce personnage excessif et déséquilibré se maria à six reprises et fit exécuter deux de ses femmes, Anne Boleyn et Catherine Howard. Tous ces événements malheureux ont été produits par les passions déréglées de Henri VIII qui souhaitait arrivé à ses fins sans aucune considération du bien commun, de l’honneur et de la vérité, mais par une obéissance aveugle à ses caprices et un utilitarisme machiavélique. Il fut excommunié par le Pape en 1534

Doctrine fondamentale de l’église réformée

Elle consiste principalement en deux points:

1° L’homme (qui n’est d’ailleurs pas libre) est justifié par la seule foi sans les oeuvres, qui sont inefficaces aussi bien que le culte, les Sacrements et les indulgences.

2° La seule règle de foi est l’Ecriture Sainte interprétée par l’individu, soit seul, soit inspirée par l’Esprit-Saint (en cas d’interprétations diverses, Dieu, acte pur et unique vérité, les ayant toutes inspirées, serait alors l’auteur de l’erreur?…). D’où il suit que l’Eglise du Christ est une Eglise invisible, formée des seuls justes, et sans hiérarchie.

Ces deux dogmes étaient des dissolvants parfaits (qui ne servaient qu’à satisfaire l’orgueil humain, les intérêts personnels des princes, excuser la licence et détruire la hiérarchie catholique): on le vit bien vite par la floraison d’une multitude de doctrines se prétendant toutes inspirées, et d’une poussière de sectes opposées qui, pour subsister, devaient, sans craindre l’illogisme, se donner une organisation extérieure (pasteurs et parfois « évêques »).

L’état actuel du protestantisme

Nous devinons trois grands tronçons principaux : le luthéranisme, répandu surtout en Allemagne, dans les pays scandinaves, en Hollande et un peu en Angleterre et en Amérique; le calvinisme (Suisse, Allemagne, quelques régions de la France; Pays-Bas; Ecosse) et l’Anglicanisme, présentant une physionomie particulière. A ces groupes historiques principaux ce sont ajouté d’innombrables sectes. Les plus répandues aujourd’hui sont les groupes évangéliques (anabaptisme, baptisme, pentecôtisme), surtout présents en Amérique et en Afrique. Cet éparpillement potentiellement infini et de fait toujours exponentiel (des « prophètes » se disant inspirés naissent à peu près tous les jours en Afrique et en Amérique) est une conséquence du libre examen. Tous ces groupes s’opposent donc sans posséder en leur sein les principes nécessaires pour démontrer l’erreur des autres (contrairement au catholicisme qui professe que la révélation ne peut-être interprétée que par l’Eglise catholique et son chef, le Pape): le libre examen et le primat de l’expérience subjective une fois posés, toute tentative de réfutation objective s’évanouit. Ce seul fait pourrait suffire à exclure le protestantisme de l’examen sur la véritable Eglise de Jésus-Christ.

Chacun est divisé en une foule de factions dissidentes et rivales s’opposant par le dogme, la morale et l’organisation: les unes niant certains Sacrements ou même tous; d’autres les acceptant comme purs symboles, d’autre enfin comme canaux de la grâce: puritains, anabaptistes, sociniens, méthodistes, mormons, unitaires, armée du salut, protestants conservateurs, protestants libéraux etc.

L’Anglicanisme en particulier, dont la doctrine est contenue dans les 39 articles de la confession de foi et le Livre de la prière publique (« Common Prayer-book ») est divisé e, trois groupes principaux: 1° La Haute-Eglise, la plus « proche » du catholicisme, dont la fraction la plus élevée (ritualisme ou puseyisme), issue du mouvement d’Oxford (1833-1850), ne diffère de l’Eglise romaine, en ce qui concerne le dogme, que sur l’infaillibilité pontificale et l’Immaculée-Conception; 2° La Basse-Eglise (ou évangélique) à tendance calvinistes; 3° et l’Eglise Large, aux dogmes rares et à la moralité relâchée.

Comme nous l’avons dit, ces variations continuelles et cet émiettement à l’extrême sont l’aboutissement logique du principe posé.

Les églises grecques et orientales dites « orthodoxes », en schisme avec Rome

Elles constituent un autre groupe de rameaux chrétiens qui ont voulu vivre d’une vie autonome, en dehors de la communion et de la communauté religieuses avec l’évêque de Rome.

La plupart de ces églises devinrent indépendantes par l’intermédiaire des patriarches de Constantinople, auxquels elles étaient soumises.

Or, ces patriarches, sous l’influence de l’antipathie des Orientaux et Occidentaux et avec la faveur du pouvoir impérial qui désirait exercer plus d’emprise sur les choses religieuses, grâce enfin à l’ambition personnelle de quelques-uns d’entre eux, provoquèrent la constitution en église autocéphale de toute la chrétienté d’Orient dépendant de leur patriarcat. Les deux principaux auteurs de cette manoeuvre furent:

Au IXème siècle, Photius, patriarche usurpateur nommé par le régent Bardas et qui provoqua une séparation momentanée avec Rome.

Au XIème siècle, Michel Cérullaire, intrigant et ambitieux, qui, en 1054, sous des prétextes divers, consomma la scission. Les invasions turques et la chute de l’Empire d’Orient (1453), desserrant les liens avec Constantinople, amenèrent la constitution de nombreuses églises nationales. Celle de Russie domina longtemps moralement. Plusieurs essais de réunion, soit avec l’Eglise Romaine (plus de 20 en quatre siècles), soit avec le protestantisme, furent vainement tentés.

La doctrine des schismatiques orientaux

Elle s’éloigne sur un assez grand nombre de points de celle de l’Eglise Romain. Au point du vue dogmatique, seuls les sept premiers Conciles œcuméniques sont acceptés; la doctrine des Sacrements: Baptême, Pénitence, Extrême-Onction, Ordre, Mariage, est différente sur plusieurs points; on admet ni le Purgatoire, ni l’Immaculée-Conception; l’Eglise du Christ serait formée d’églises nationales autonomes; pas de primauté ni d’infaillibilité pontificale, car tous les Apôtres ou évêques sont égaux ; Saint Pierre n’aurait reçu qu’un préséance d’honneur passée d’abord à l’évêque de Rome, puis à celui de Constantinople. L’infaillibilité appartient au corps épiscopal dans son ensemble. Enfin, le Saint-Esprit ne procéderait que du Père; d’où les difficultés touchant l’insertion du mot Filioque dans le Symbole de Nicée, qu’on prétexta dès le début. Le divergences sont plus nombreuses encore touchant la discipline et la liturgie (mariage des simples prêtres, baptême par immersion, etc.).

Etat actuel de ces églises nationales autonomes

Elles sont réparties en églises nationales formant quatre groupes: 1° grec (Constantinople, Grèce, Chypre); 2° gréco-arabe (Palestine, Syrie, Egypte); 3° slave (Russie, Bulgarie, Yougo-Slavie); 4° roumain (Roumanie et Transylvanie, une partie de la Pologne et de la Hongrie.

On peut y rattacher aussi un certain nombre d’églises séparées orientales provenant des hérésies anciennes sur la nature du Christ (nestorianisme et eutychianisme): Eglise copte (en Egypte et Abyssinie); arménienne; chaldéenne, et jacobite (Syrie et Mésopotamie).

L’ensemble forme donc, on le voit, un groupe assez peu homogène, dont les éléments sont tous plus ou moins influencées par le pouvoir national et civil en chaque nation. Encore de nos jours, les division continuent à se multiplier (voir Le schisme dans le schisme).

Problème à résoudre

La question à résoudre peut se formuler ainsi:

Quelle est, parmi les sociétés existant actuellement et se donnant comme chrétiennes, celle que Jésus-Christ a fondée, et à quoi peut-on la reconnaître?

Pour rechercher la véritable Eglise de Jésus-Christ, il faut étudier successivement son institution, ses marques distinctives et ses propriétés essentielles assignées par le Fondateur.

Saint Grégoire recevant la visite de la colombe, Matthias Stom, XVIIème siècle

Institution de l’Eglise

Nous avons déjà démontrer que les Évangiles étaient authentiques et que Jésus-Christ était Dieu. Autrement dit, nous sommes désormais certains que Dieu s’est bien révélé et qu’il l’a fait par Jésus-Christ. Nous avons aussi vu tout ce qu’impliquait la divinité de Jésus-Christ, pour lui (nature et attributs) et pour nous (le suivre). Nous nous demanderons maintenant ce qu’a fait le Christ, pour mettre sa révélation à notre portée, à la portée de tous les hommes. Si sa sagesse divine Lui conseillait un moyen souverainement efficace, Il a dû évidemment le prendre; on peut constater ensuite s’il l’a pris en fait. Nous nous poserons donc successivement ces deux questions:

Jésus devait-il fonder dans ce but une société visible et enseignante?

En fait, l’a-t-il fondée?

Conseils pratiques de vie chrétienne

Si nous voulons que Jésus-Christ règne dans le monde et dans les coeurs, il faut d’abord le faire régner dans nos âmes et dans toutes les actions de notre vie, même les plus petites.

Tous les jours, prions Dieu de nous donner une bonne volonté et de nous aider à réformer nos vies en vue de les rendre vraiment chrétiennes.

Si nous avons la foi en Dieu, alors nous devons agir comme nous pensons, car nous finissons inévitablement par penser comme nous agissons, voilà pourquoi il faut s’efforcer d’avoir une vie ordonnée et vertueuse.


Voici des pistes de résolutions à prendre, avec l’aide de Dieu.

Le progrès spirituel exige des choix concrets

  • Fuir les occasions prochaines de péché
  • Se connaître soi-même : ses faiblesses, excès, mauvaises habitudes
  • Rompre avec ces esclavages que sont les mauvaises habitudes : renoncement de soi-même, offrir ses peines
  • Être prêt à des choix douloureux s’ils sont nécessaires au bien de notre âme et à la Gloire de Dieu
  • Travailler à être vertueux

Une vie chrétienne est une vie ordonnée (Dieu est ordre)

  • Ne pas négliger le devoir d’état
  • Avoir des horaires de lever, de coucher, de repas raisonnables
  • Être tempérant (dans la nourriture par exemple)
  • Faire du sport

Avoir des convictions nécessite d’être formé

  • S’instruire sur la religion : Catéchisme, Encycliques
  • Penser à ses fins dernières

La pratique des sacrements : le recours à la grâce sacramentelle, c’est à dire à la vie divine !

  • Confessions mensuelles (et plus si nécessaire)
  • Communion hebdomadaire (et plus si possible)

La piété est essentielle : la dévotion

  • Prière du matin, prière du soir, chapelet
  • Prier à genoux (si on le peut) est très utile
  • Se faire un petit oratoire chez soi / dans sa chambre
  • Assister à des Messes en semaine (le premier vendredi du mois par exemple)
  • Prendre l’habitude des prières avant/après la communion et des prières d’action de grâce
    systématiquement après la Messe (plusieurs minutes), choisir quelques courtes prières à réciter
    chaque jour : prendre l’habitude de parler avec Jésus, d’avoir une relation personnelle avec lui.
  • Lecture spirituelle (livre de spiritualité ou vie de saint)
  • Chemin de croix, Pèlerinages et récollection, vêpres et Salut du Saint-Sacrement

Les œuvres extérieures et l’apostolat : vivre l’évangile en acte

  • Faire le bien autour de soi
  • Aider l’Eglise, le prêtre dans les choses matérielles
  • Souffrir pour Dieu (le temps de transport pour la Messe typiquement)
  • Participer aux activités organisées par votre chapelle
  • Retraites spirituelles de Saint-Ignace régulières (tous les deux ans par exemple)

6 objections contre le sédévacantisme : réfutation



Le sédévacantisme est un schisme

Réponse

Un schismatique est quelqu’un qui, méprisant l’enseignement du Christ sur la primauté de Saint Pierre et des pasteurs légitimes de l’Eglise, refuse d’obéir à ses lois et à sa discipline, et érige son propre gouvernement indépendant de celle-ci. Pour dire plus simplement encore, un schismatique est un chrétien qui refuse de se soumettre à l’autorité de l’Eglise, en prétendant que son autorité n’a pas de fondement. Le schisme est un péché mortel contre la charité, car il brise l’unité du Corps Mystique de Jésus-Christ.

Les sédévacantistes ne sont pas des schismatiques car :

  • Ils ne nient pas la légitimité des successeurs de Saint Pierre pour légiférer, de manière monarchique et sans contestation possible, sur l’ensemble de l’Église ;
  • Ils n’ont nullement l’intention d’ériger une autorité concurrente, une hiérarchie indépendante contre l’autorité et la hiérarchie de l’Église catholique ;
  • Ils n’entendent pas, concernant l’administration des sacrements et toute autre chose relative à la religion, agir d’une autre manière que celle qui a été promulguée par l’autorité de l’Église.

Les sédévacantistes s’opposent à ce qui semble être pour beaucoup la hiérarchie de l’Église catholique, non pas par esprit de schisme, mais au contraire par souci de rester fidèle à l’autorité de l’Église catholique qui a enseigné, promulgué et ratifié des doctrines et des dispositions disciplinaires auxquelles s’opposent formellement les nouvelles doctrines (qui sont fausses) et la nouvelle discipline (qui est mauvaise) des conciliaires.

Accuser les sédévacantistes d’être schismatiques serait aussi hors de propos que d’accuser les luthériens de nier que la Bible soit révélée et sans erreur : le problème du luthéranisme se trouve ailleurs ; ainsi le «problème» du sédévacantiste réside dans la discussion cherchant à savoir si François est Pape ou non, pas sur le fait de savoir s’il faut être soumis au Pape pour sauver son âme – ce dont les sédévacantistes sont absolument convaincus. Or, chercher à savoir si quelqu’un est Pape ou non, c’est simplement faire œuvre de discernement, comme l’ont fait les catholiques et les saints ayant vécu dans des siècles troublés où l’on avait des doutes sur la légitimité de certaines personnes qui prétendaient être Papes ; ce n’est pas faire acte de schisme.

“Finally, one cannot consider as schismatics those who refuse to obey the Roman Pontiff because they would hold his person suspect or, because of widespread rumors, doubtfully elected (as happened after the election of Urban VI), or who would resist him as a civil authority and not as pastor of the Church.” (Wernz-Vidal, Ius Canonicum [Rome: Gregorian 1937], 7:398, my emphasis.)(modifié)[17:21]In fact, Fr. Ignatius Szal emphasizes that one essential ingredient to true and proper schism is that the schismatic, in spite of his disobedience, “must recognize the Roman Pontiff as the true pastor of the Church, and he must profess as an article of faith that obedience is due the Roman Pontiff”

(Rev. Ignatius Szal, The Communication of Catholics with Schismatics [Washington, DC: The Catholic University of America Press, 1948, p. 2).

Les sédévacantistes sont hérétiques

Réponse

Une hérésie est une doctrine qui s’oppose directement à une ou plusieurs vérités révélées contenues dans l’enseignement de l’Église. Un hérétique, au sens formel du terme, est quelqu’un qui adhère à cette doctrine en pleine connaissance de cause, c’est à dire en sachant qu’elle s’oppose à l’enseignement de l’Église catholique. On peut adhérer à des hérésies par ignorance de l’enseignement de l’Église, par suite d’un raisonnement erroné, ou bien par une mauvaise compréhension des dogmes ; cela ne suffit pas à ce que cette adhésion intellectuelle devienne un véritable péché d’hérésie, et fasse mériter devant Dieu et devant les hommes le nom d’hérétique : il faut pour cela ce que l’on appelle la pertinacité, qui est la persévérance dans l’erreur malgré les admonitions de l’Église, malgré la claire connaissance de la réprobation de ses opinions par l’Église. Par commodité on peut dire que ceux qui adhèrent à des hérésies sans faute sont «matériellement hérétiques», et ceux qui y adhèrent avec pertinacité sont «formellement hérétiques». Voir l’article «Hérésie» de la Catholic Encyclopedia

Le sédévacantisme n’est pas une hérésie, et ceux qui adhèrent au sédévacantisme ne sont hérétiques ni matériellement, ni formellement, car :

  • Ils ne nient aucun des enseignements de l’Église catholique, que celui-ci soit solennel ou simplement ordinaire, concernant la Papauté, ses prérogatives et ses droits ;
  • L’Église n’enseigne pas qu’il est impossible que le siège soit vacant pendant une très longue période : s’il peut être vacant 1 jour, 1 mois ou 1 an, à prendre la chose en soi rien n’interdit qu’il soit vacant 1000 ans, aussi terrible que cela puisse être pour la vie de l’Église et le salut des âmes ;
  • L’Église n’enseigne pas qu’il est impossible qu’une personne qui soit élue à la Papauté, et même acceptée pacifiquement comme Pape par l’Église universelle, ne soit pas réellement Pape. Son histoire nous apprend plutôt le contraire, à savoir qu’à une époque a été envisagée le cas où un hérétique (formel) serait élu à la Papauté, et reconnu comme Pape à ce titre : la bulle Cum ex apostolatus officio de Paul IV (1559) déclare une telle élection nulle et sans effet. Par ailleurs il n’a jamais été question, dans la théologie catholique, de dire que l’acceptation pacifique par une unanimité morale des catholiques était une condition ou une preuve du fait que la personne considérée comme telle est réellement Pape.
  • Pour notre part, et nous pensons que c’est le cas de la plupart des sédévacantistes, nous professons n’avoir aucune intention d’adhérer à des opinions condamnées par l’Église ni de nous opposer en quoi que ce soit à son magistère, et nous serions prêt à rétracter toutes nos idées et nos positions s’il apparaissait que l’Église les condamnait. Le principe que nous appliquons pour savoir comment régler notre jugement et notre vie toute entière, est celui de coller le plus prêt que possible à l’esprit de l’Église, même en ce qui n’est pas obligatoire et infailliblement promulgué, même pour des questions d’ordre pastoral et pratique.

NB. Il se peut que certaines personnes soient sédévacantistes et adhèrent par ailleurs à des hérésies, c’est le cas des frères Dimond et de leur doctrine dite feeneyiste, qui nie l’enseignement de l’Église catholique concernant le Baptême de désir et le Baptême de sang. Ce problème n’a, en soi, aucun rapport avec le sédévacantisme. Ce serait un peu comme prétendre que tous les jésuites sont hérétiques, parce que quelques jésuites isolés ont défendu des doctrines fausses : il ne faut pas tout confondre, si certains membres d’un groupe adhèrent à des hérésies, cela ne rend pas le groupe en lui-même hérétique. L’analogie est imparfaite parce que les sédévacantistes ne constituent pas «un groupe» bien constitué, mais il s’agit simplement d’un ensemble de personnes qui font profession de foi catholique et qui se retrouvent donc à faire le constat d’une vacance du Saint-Siège. Cette position selon laquelle le Siège apostolique est vacant ne relève en rien de l’hérésie.


Le constat sédévacantiste est un jugement téméraire et illégitime

Réponse

« Si quelqu’un dit que Dieu unique et véritable, notre Créateur et Maître, ne peut pas être connu avec certitude par la lumière naturelle de la raison humaine, au moyen des choses qui ont été créées ; qu’il soit anathème » 

L’Eglise défend ici la légitimité d’un jugement fondé sur des vérités naturelles. En l’occurrence : l’existence du monde, son harmonie et le principe de causalité. Ces choses étant certaines, la conclusion l’est aussi. Si un raisonnement correct met en œuvre une vérité de foi fondée sur l’autorité de Dieu et une vérité naturelle évidente, la conclusion exprimera un jugement doté d’une certitude absolue, propre à entraîner l’assentiment plein et entier de l’intelligence. Une telle conclusion est dite théologique. Par exemple : « Jésus est un homme (vérité de foi). Or les hommes ont une âme (vérité naturelle). Donc Jésus a une âme (conclusion théologique) ». 

Le constat actuel de la vacance du Siège apostolique n’a pas plus de prétention. Il se sert, dans sa démonstration, de données de foi, de faits d’observation immédiate et du principe de non-contradiction. La foi nous assure de l’infaillibilité du magistère ordinaire et universel. Elle nous assure qu’il est impossible qu’un Pape promulgue avec les évêques représentant l’Eglise universelle un texte contredisant un point de doctrine déjà fixé. Or, une telle promulgation s’est produite lors du concile Vatican II : la déclaration Dignitatis Humanae du 7 décembre 1965 contredit explicitement l’enseignement de Pie IX (entre autres) sur la liberté religieuse dans Quanta Cura (lettre encyclique du 8 décembre 1864). Donc les occupants du Siège apostolique qui ont « promulgué » et maintiennent en union avec tous les évêques une telle doctrine ne peuvent pas être Papes. 

Affirmations condamnées par Quanta Cura, 8 décembre 1864 [«  contre la doctrine de la Sainte Écriture, de l’Église et des saints Pères »] Affirmations de Dignitatis Humanae, 7 décembre 1965 [«  le droit à la liberté religieuse a son fondement réel dans la dignité même de la personne humaine telle que l’ont fait connaître la Parole de Dieu et la raison elle-même »]

a) la meilleure condition de la société est celle où on ne reconnaît pas au pouvoir le devoir de réprimer par des peines légales les violations de la loi catholique, si ce n’est dans la mesure où la tranquillité publique le demande

a’) de telle sorte qu’en matière religieuse nul ne soit forcé d’agir contre sa conscience ni empêché d’agir, dans de justes limites, selon sa conscience, en privé comme en public, seul ou associé à d’autres

b) La liberté de conscience et des cultes est un droit propre à chaque homme

b’) Ce Concile du Vatican déclare que la personne humaine a droit à la liberté religieuse

c) Ce droit doit être proclamé et garanti par la loi dans toute société bien organisée

c’) Ce droit de la personne humaine à la liberté religieuse dans l’ordre juridique de la société doit être reconnu de telle manière qu’il constitue un droit civil

Ce qu’affirme Vatican II en (a’), (b’), (c’) est condamné par Quanta Cura en (a), (b), (c). Les deux textes se prononcent sur le même sujet : le droit d’exercice public des religions et des cultes, même non catholiques. Les deux textes en appellent à la Révélation et s’expriment, quoi que dans une époque particulière et en raison même de cette époque, d’une façon absolue, comme énonçant un principe de droit naturel.

Cette conclusion sur l’absence actuelle d’Autorité dans l’Eglise, au demeurant triste à poser et troublante pour tous les fidèles, s’impose dans la lumière de la foi, avec une certitude de l’ordre de la foi. Parce que la foi catholique est une, parce qu’elle n’abolit pas la raison et que le principe de non-contradiction est inhérent à son exercice, il est métaphysiquement impossible d’adhérer religieusement à l’enseignement et par conséquent à l’autorité de ces faux pasteurs. Tout fidèle prudent qui vit effectivement de la foi peut et doit conclure à l’absence d’Autorité. L’exercice de la foi catholique rend impossible l’assentiment à l’enseignement de Vatican II. 

Un jugement est téméraire et illégitime si il est prononcé précipitamment, sans intention droite et que les fondements sur lesquels il repose sont incertains ou faux. Par exemple : prêter une mauvaise intention à quelqu’un sans raison. Dans une matière si grave que la foi et avec des certitudes d’un degré tel que nous venons de l’exposer, le jugement s’impose absolument et constitue un devoir. Il ne s’agit pas d’un jugement a priori qui serait consécutif à un caprice de notre part, il s’agit de l’impossibilité métaphysique d’adhérer à une règle de foi qui contredit objectivement l’enseignement de l’Eglise. La meilleure volonté du monde ne pourra pas changer la nature des choses, une chose ne peut pas, en même temps et sous le même rapport, être vraie et fausse. Nous pensons que cela suffit pour fonder la légitimité d’un tel jugement. Les fidèles ne peuvent pas, par jugement privé, ne pas accuser ceux qui « promulguent » ces enseignements, comme les fidèles de Constantinople rompirent la communion avec leur évêque Nestorius entre 428 et 431 (date de sa condamnation), car celui-ci enseignait une doctrine ouvertement contraire à la foi catholique.

L’imprudence se situerait au contraire dans la négation de ce jugement absolument certain. En effet, en rejetant cette conclusion, on est objectivement poussé à relativiser ou à nier des vérités de foi : soit en acceptant l’enseignement de Vatican II et ses suites, qui s’oppose en de nombreux points au Magistère de l’Eglise ; soit en le refusant, attribuant ainsi l’erreur au Pape et à l’Eglise, niant de fait la sainteté et l’infaillibilité de celle-ci.

Les catholiques qui font le constat de la vacance du Siège apostolique ne se substituent nullement à l’Eglise et à son autorité. Ce jugement n’est qu’un constat indubitable, il n’a pas force de loi et n’a pas de portée juridique objective pour l’Eglise. La privation d’autorité qui affecte actuellement l’Eglise rend précisément compliqué une telle sentence authentique. En revanche, de ce jugement certain découle le devoir de ne rien dire ni rien faire qui reviendrait pratiquement à reconnaître l’Autorité à l’actuel occupant du Siège ainsi que celui de proclamer, selon les règles de la prudence et conformément aux moyens dont chacun dispose, la vacance actuelle du Siège apostolique.

« Nous ne pouvons pas ne pas parler »

Act. IV, 20 

On a le droit de résister au Pape et à l’Église

Réponse

« Quant à déterminer quelles sont les doctrines révélées de Dieu, c’est la mission de l’Église enseignante, à laquelle Dieu a confié la garde et l’interprétation de ses paroles. Dans l’Église, le docteur suprême est le Pontife Romain. (…) [Il faut l’obéissance au Magistère de l’Église et du Pape]. L’obéissance doit être parfaite, parce qu’elle est exigée par la foi elle-même, et elle a cela de commun qu’elle ne peut pas être partielle… C’est ce que St Thomas d’Aquin explique d’une manière admirable dans le passage suivant:“(…) Or, il est manifeste que celui qui adhère à la doctrine de l’Église comme à une règle infaillible donne son assentiment à tout ce que l’Église enseigne; autrement, si, parmi les choses que l’Église enseigne, il admet ce qu’il veut et n’admet pas ce qu’il ne veut pas, il adhère non plus à la doctrine de l’Église comme à une règle infaillible, mais à sa propre volonté… L’unité [de l’Église] ne saurait être sauvegardée que si toute question soulevée en matière de foi est résolue par celui qui est le chef de l’Église entière, de sorte que sa sentence soit fermement acceptée par toute l’Église. C’est pourquoi de l’autorité du Souverain Pontife seul relève une nouvelle édition du Symbole comme toutes les autres choses qui regardent l’Église universelle” … C’est pourquoi le Souverain Pontife doit pouvoir déclarer avec autorité ce que contient la parole divine, quelles doctrines concordent avec elle et quelles doctrines s’en écartent: pour la même raison, il doit pouvoir montrer ce qui est bien et ce qui est mal, ce qu’il faut faire et ce qu’il faut éviter pour faire son salut; autrement, il ne pourrait être ni l’interprète infaillible de la parole de Dieu, ni le guide sûr de le vie humaine »

Léon XIII

Cette obéissance appartient à la foi catholique selon saint Pie X :

« C’est dans cette obéissance à la suprême autorité de l’Église et du Souverain Pontife, autorité qui nous propose les vérités de la foi, nous impose les lois de l’Église et nous commande tout ce qui est nécessaire à son bon gouvernement, c’est dans cette autorité que se trouve la règle de notre foi »

Saint Pie X, Catéchisme Romain, Petite Histoire de la Religion, éd. Itinéraires, reprint Dominique Martin Morin, 1978, p. 354

Le Concile Vatican II est pastoral

Réponse

Jésus-Christ a fondé son Eglise en la dotant du pouvoir d’enseigner les vérités contenues dans la Révélation pour les proposer à la foi des fidèles. Fondé sur la Sainte Ecriture, cette infaillibilité a toujours été crue et enseignée par l’Eglise et les théologiens (Voir par exemples l’œuvre de Mgr de Ségur, Le dogme de l’infaillibilité,pp.221-432). L’Eglise enseignante, composée du Pape et des évêques, ne peut pas errer dans son enseignement sur la foi et la morale. Lorsqu’un concile, qui n’est autre que l’Eglise enseignante réunie physiquement, enseigne qu’une vérité est contenue dans la Révélation ou nécessaire à sa compréhension, le fidèle est par le fait même tenu d’y adhérer. En tant que tel, le concile Vatican II aurait donc dû être infaillible toutes les fois qu’il proposait un enseignement en matière de foi et de morale, toutes les fois qu’il exposait une « vérité » contenue dans la Révélation ou nécessairement liée à celle-ci. C’est le cas plusieurs documents du concile qui posent problème à cause de leurs enseignements contraires à la doctrine catholique déjà définie : La déclaration Dignitatis humanae sur la liberté religieuse par exemple. Tous les fidèles auraient dû adhérer religieusement, dans la lumière de la foi, au principe de la liberté religieuse. Évidement, ce principe a déjà été infailliblement condamné par Pie IX (entre autres), signe que le concile Vatican II ne peut pas avoir été promulgué par un pape authentique.

Même dans ses dispositions disciplinaires qui peuvent être modifiées ou abrogées par l’autorité légitime du pape, l’Eglise ne fait qu’appliquer des principes de foi et de morale nécessairement vrais et bons. La discipline et la loi peuvent changer, les principes sur lesquels elles reposent ne le peuvent pas. Si elles peuvent être plus ou moins parfaites, plus ou moins opportunes, elles ne peuvent certainement pas conduire les fidèles qui les observent au mal et à la damnation, elles ne peuvent être nocives à la foi, la morale et le salut éternel : c’est l’inerrance ou « infaillibilité négative » (le cardinal Franzelin l’évoque : FRANZELIN, De Traditione, T. XII, Schol. 1. Cité par L. BILLOT, De Ecclesia Christi, T. I, P. II, c. II, q. X pp. 444-5). Soutenir le contraire va à l’encontre de la sainteté de l’Eglise qui est continuellement assistée par Jésus-Christ en donnant des moyens infaillibles de salut aux fidèles. Pie VI a d’ailleurs jugé cette doctrine « fausse, téméraire, scandaleuse, pernicieuse, offensive des oreilles pies, injurieuse pour l’Église et pour l’Esprit de Dieu par qui elle est conduite, et erronée pour le moins ». Redisons le donc clairement : même dans ses enseignements « pastoraux », l’Eglise ne peut pas se tromper en matière de foi et de morale.

L’article qui suit apporte une réponse plus détaillée : https://religioncatholique.fr/2021/09/02/peut-on-rejeter-vatican-ii-car-il-sagit-dun-concile-pastoral/


Être sédévacantiste c’est abandonner l’Église et en sortir

Réponse

On entend souvent qu’être sédévacantiste est une désertion et qu’il faut rester fidèle à l’Église malgré la crise et agir de l’intérieur.
Être fidèle à l’Église c’est être fidèle à la Foi. Est-ce que l’Église du Christ peut enseigner l’erreur, promulguer des lois mauvaises, et corrompre les âmes au point qu’elle enseigne une nouvelle religion qui n’a plus rien à voir avec le catholicisme et qui pousse à l’indifférentisme le plus absolu ? Non.
Ce n’est donc pas « l’Église » qui est en train de faire cela et dire qu’il faut « rester dans l’Eglise » dans ces circonstances c’est dire que l’Église est cette société corrompue que l’on voit actuellement.
Pour un catholique d’avant Vatican II, ce serait considéré comme un blasphème de dire que l’autorité de l’Église peut faire cela (enseigner l’hérésie et faire une liturgie protestante).
« Rester dans l’Église » c’est rester dans les paroisses corrompues dont on ressortira indifférent au Christ et à son message, et paradoxalement indifférent à son Église, puisque c’est un autre esprit qui anime la paroisse et toutes ses activités.
Beaucoup de « traditionalistes » qui veulent « infiltrer » ou « influencer de l’intérieur » sont devenus plus modernistes qu’ils ne l’étaient en commençant cette démarche. Cela se vérifie y compris pour la FSSPX qui est dans une mentalité de plus en plus libérale.