Jésus-Christ a fondé une Eglise
Les deux conceptions sur la règle de la foi se retrouvent ici. Quel est le moyen de conserver, propager, expliquer, la doctrine instituée de fait par Jésus-Christ?
Les uns (protestants ou héritiers de l’individualisme moderne) disent: un moyen purement intérieur, individuel;
Les autres (catholiques), conformément aux documents historiques de l’Évangile et à la tradition, disent: une autorité visible et sociale.
Jésus-Christ a institué lui-même, réellement, une Eglise, société hiérarchique visible
La raison le montre
Ce que Jésus devait faire, il l’a fait certainement. L’institution d’une société religieuse était moralement nécessaire, nous l’avons vu, au bon succès définitif de la mission de Jésus. Or, Notre-Seigneur est Dieu, et possède toute lumière sur ce qui est utile ou nécessaire à l’avenir de son oeuvre. Donc il a institué une société religieuse visible.
Le texte évangélique le prouve
Cet argument basé sur les textes de l’Évangile (spécialement Saint Mattheiu XVI, 17, 20; XVIII, 18; XVIII, 18, 20; Saint Luc, XXII, 32; Saint Jean, XXI, 15), est tiré des paroles de Jésus:
1° à Saint Pierre:
« Tu es Pierre, et, sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise, et les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle. Je te donnerai les clefs du royaume des cieux. Tout ce que tu lieras sur la terre, sera lié dans le ciel. Tout ce que tu délieras sur la terre, sera délié dans le ciel. » (Mt. XVI, 18-20) « J’ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas, et toi, t’étant repenti, un jour, affermis tes frères. » (Luc, XXII, 32) « Pais, mes agneaux, pais mes brebis. » (Jn. XXI, 15)
2° aux apôtres unis à Saint Pierre:
« Tout ce que vous lierez sur la terre, sera lié dans le ciel; tout ce que vous délierez sur la terre, sera délié dans le ciel. » (Mt. XVIII, 18)
Selon tous ces textes concordants, Jésus promet d’abord (ce qui nous donne déjà une certitude absolue, puisque Jésus, Dieu, est sincère et puissant), puis Il réalise l’institution d’une société religieuse extérieure, visible, avec tous ses éléments énoncés.
Il en est le fondateur
« Je bâtirai mon Eglise« , « Je te donnerai les clés du royaume des cieux. », « Pais, mes agneaux, pais mes brebis. » Il en reste le chef invisible et indéfectible: « Je serai avec vous jusqu’à la consommation des siècles.«
Ce qu’Il fonde, c’est une Eglise
En effet, c’est une collectivité visible d’êtres corporels, unis par les liens et extérieurs. On en trouve la preuve:
1° Dans les termes et comparaisons employés: royaume, famille, cité, filet plein de poissons; bercail, troupeau, maison; Eglise, c’est-à-dire société, réunion visible.
2° Par les liens qui unissent les membres de la société: pour y entrer, le rite visible du baptême, précédé d’une profession extérieure de foi (« celui qui croira, et sera baptisé » (Mc. XVI, 16)); dans la suite: participation aux mêmes biens (sacrements), et obéissance aux mêmes chefs visibles (« s’il n’écoute pas l’Eglise, qu’il soit comme un païen et un publicain » (Mt. XVIII, 17))
Il donne une autorité à cette société
A cette société, Il donne une autorité constitutive, des chefs, avec un rôle visible (« Désormais, tu seras pêcheurs d’hommes » (Luc, V, 10)). Ce sont les apôtres et leurs successeurs. Il choisit un chef suprême, qui paît les brebis (pasteurs secondaires) comme les agneaux (fidèles). Paître signifie diriger, guider, prendre soin, gouverner, donner au troupeau avec l’autorité du pasteur, tout ce qui lui est nécessaire:
« Tu es Pierre, et, sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise » (Mt., XVI, 18), c’est-à-dire: tu es le principe de la solidité de ma société. Or, dans une société, le principe de solidité est l’autorité, qui unit et dirige les volontés, vers le même but, pas les moyens adéquats.
« Je te donnerai les clés » (Mt., XVI, 19), c’est-à-dire: la puissance souveraine sur le royaume des cieux. Or, ce royaume des cieux, c’est l’Eglise de la terre, qui mène aux cieux, car, au ciel, il n’est pas besoin d’autorité autre que celle de Dieu.
A ces chefs, il donne les pouvoirs nécessaires pour une société de ce genre:
1° le Pouvoir d’enseignement pour éclairer les intelligences; à Pierre: « Affermis tes frères » (Luc, XXII, 32) puis à tous: « Allez, enseignez toutes les nations » (Mt., XXVIII, 19).
2° Pouvoir de gouvernement obligeant et guidant les volontés, qui doivent obéir sous peine de condamnation. A saint Pierre puis à tous (Mt., XVI, 19 puis XVIII, 18): « Tout ce que tu liera (commanderas) sera lié dans le ciel« , c’est-à-dire, obligera en conscience, devant Dieu, car l’obligation (ob-ligare) n’est pas autre chose qu’un lien de la conscience, le pouvoir capable d’imposer ce lien n’est autre que l’autorité, le gouvernement. A saint Pierre: « Pais mes agneaux, mes brebis » (Jean, XXI, 15), donne tout ce qui est nécessaire: pour cela, il faut pouvoir commander. De ce pouvoir de gouvernement découle le pouvoir de jugement: « Si quelqu’un n’obéit pas à l’Eglise, qu’il soit regardé comme un païen et un publicain.«
3° Pouvoir d’ordre ou de sanctification: pouvoir d’administrer les sacrements, biens de l’Eglise et canaux de la grâce: « Baptisez au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit » (Mt., XXVIII, 19) et « Faites ceci en mémoire de moi. » (Luc, XXII, 19)
Le but de la société (salut et sanctification des membres, continuation de la mission du Christ) se poursuit par des moyens extérieurs et sociaux: participation aux sacrement, biens communs de la société.
Ces enseignements sont réunis, résumés comme en un testament, dans les dernières paroles de Notre-Seigneur, rapportées dans l’évangile de Saint Matthieu (XXVIII, 19, 20) et de Saint Jean (XX, 23):
« Tout pouvoir m’a été donné dans le ciel et sur la terre: Allez donc, instruisez toutes les nations (pouvoir d’enseignement). Baptisez-les, au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit (pouvoir d’ordre). Apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai prescrit (pouvoir de gouvernement). Les péchés seront remis à qui vous les remettrez (pouvoir de jugement et d’ordre). Voici que je suis avec vous, jusqu’à la fin du monde (perpétuité, infaillibilité). Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé (liens visibles).
Donc Jésus a voulu fonder, et a fondé une société religieuse, hiérarchique et visible: son Eglise.
L’histoire des premiers temps de l’Eglise prouve aussi l’institution de cette société
C’est elle, en effet, que nous voyons fonctionner des le christianisme primitif.
Les faits constatés
Cette société religieuse organisée (elle a toujours été la même dans son essence mais a connu des évolutions accidentelles au cours du temps: liées aux moyens disponibles, au développement extérieure de l’institution, à son influence etc.) apparaît, soit en Palestine, soit dans le monde païen, comme un corps social, distinct de la religion juive, et possédant:
1° Une hiérarchie visible: les chefs sous l’autorité de Pierre sont les apôtres et ceux qu’ils choisissent pour les aider et les suppléer; ils dirigent, commandent, gouvernent les volontés des nouveaux convertis, jugent et punissent les violateurs de la loi nouvelle (Actes, V, 1, 12) (II, Corinth., II).
2° Un pouvoir enseignant, qui se présente de façon catégorique et infaillible comme transmettant les paroles du Christ, que les apôtres imposent en intermédiaires authentiques: « Ils ne peuvent pas ne pas parler » (Actes, IV, 19, 21); concile de Jérusalem en 51 sur l’abandon des pratiques de la loi mosaïque auxquelles les anciens juifs étaient attachés.
3° Des rites extérieurs spécifiquement chrétiens, qui constituent l’entrée dans la société ou y assurent la vie cultuelle; le baptême [Saint Pierre lors d’un prédication à Jérusalem: Faites pénitence, et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ, pour la rémission de vos péchés ; et vous recevrez le don du Saint-Esprit (Actes, II, 38). Trois mille personnes environ furent baptisées ce jour-là (Actes, II, 41); Le diacre Philippe baptisa le ministre de Candace, reine d’Éthiopie, dans un cours d’eau (Actes, VIII, 36)], l’imposition des mains [C’est ainsi que firent Pierre et Jean avec les convertis de Samarie : ils … prièrent pour eux, afin qu’ils reçussent l’Esprit-Saint : car il n’était encore descendu sur aucun d’eux, mais ils avaient été seulement baptisés au nom du Seigneur Jésus. Alors ils leur imposaient les mains, et ils recevaient l’Esprit-Saint (Actes VIII, 14-17). Saint Paul imposa les mains sur les baptisés d’Éphèse et l’Esprit-Saint vint sur eux ; et ils parlaient diverses langues et prophétisaient (Actes, XIX, 6)], les onctions, la fraction du pain ou Eucharistie. Or, tout ceci correspond à l’institution de Jésus lui-même et nous en est une nouvelle garantie.
La valeur de ces faits
En effet, il n’y a pas eu d’interruption entre les ordres donnés par Jésus et l’établissement de cette société hiérarchique. Sans doute, l’Eglise n’est pas apparue d’un seul coup, toute faite pour ainsi dire et avec tous les rouages que nous lui connaissons aujourd’hui (d’un point de vue humain, extérieur, institutionnel, dans l’exposition de plus en plus précise de la révélation etc.). Mais, aussitôt après le Pentecôte, les apôtres ont commencé à réaliser le plan dicté par Jésus, et l’ont réalisé dans ces lignes essentielles (les pouvoirs de gouvernement, d’enseignement, de sanctification, l’unité, la sainteté, l’apostolicité et la catholicité). Les Actes des apôtres sont la mise en oeuvre immédiate de l’Évangile.
Les témoins
Nous en avons d’ailleurs divers autres témoins, qui nous permettent de remonter jusqu’aux âges apostoliques:
IIe siècle (fin)
Saint Irénée montre dans le caractère hiérarchique de l’Eglise un fait notoire et incontestée, institué par Jésus et les apôtres. Il ne l’aurait pas pu si cette hiérarchie avait été de fondation récente: de nombreuses contestations se seraient élevées. Or saint Irénée était témoin pour Rome, l’Orient et la Gaule, et touchait par son maître, saint Polycarpe, disciple de Saint Jean, à l’époque primitive de l’Eglise.
IIe siècle (milieu)
Saint Polycarpe affirme, lui aussi, que les pasteurs sont les gardiens de la foi et les chefs de la hiérarchie. Divers autres auteurs affirment également: l’existence de chefs reconnus, évêques successeurs des apôtres (Hégésippe), le Pontife de Rome (Denys de Corinthe); et l’identité permanente dans la foi et les sacrements (Albercius).
IIe siècle (début)
Saint Ignace d’Antioche.
Ier siècle (fin)
Saint Clément de Rome, disciple immédiat de saint Pierre et de saint Paul. Tous deux (Ignace et Clément) montrent dans la société instituée par le Christ une hiérarchie gouvernant les églises pour garder la tradition, sous l’autorité universelle de l’Eglise de Rome.
Ainsi, l’Évangile et l’histoire coïncident très nettement sur le point qui nous intéresse: le Christ a donc institué une autorité sociale de magistère, de gouvernement et de sanctification des âmes: son Eglise.
Trois conséquences découlent de cette conclusion:
1° Jésus-Christ n’a institué qu’une seule Eglise, tout le prouve. Les paroles de Jésus et des apôtres sont formelle: « Il n’y a qu’un seul troupeau et qu’un seul pasteur. » (Jean, X, 16); « Une seule foi, un seul baptême, un seul corps. » (épître aux éphésiens, IV, 4, 5). L’homme, d’ailleurs, a un besoin absolu de cette unité. Pour lui, la diversité tuerait la certitude. Puisque, sur chaque point dogmatique et moral, il n’y a qu’une vérité, deux sociétés, naturellement distinctes en quelques points, ne peuvent venir également de Dieu.
2° Il y a une obligation stricte, de rechercher l’Eglise unique instituée par Jésus-Christ. L’indifférentisme religieux est donc à la fois illogique en lui-même; injurieux pour Dieu et Jésus, qui ont désigné un chemin à suivre; dangereux, et même gravement périlleux dans ses conséquences pour nous-mêmes. Nous devons donc et nous allons poursuivre nos recherches.
3° L’Eglise unique fondée par Jésus-Christ doit donc être reconnaissable à certaines marques; c’est ce que nous allons maintenant constater.
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