L’erreur du salut par la piété seule


Nous publions ici la traduction d’un article du blog de Mgr Sanborn [1] contre la culture moderne et l’idée qu’il suffit d’être « pieux » pour sauver son âme, qu’il suffit de transmettre à ses enfants la piété pour en faire de parfaits chrétiens. En effet il ne suffit pas d’entretenir de multiples pratiques de piété, même très sincères, pour être un bon chrétien qui vit loin du péché : il faut aussi être prudent vis-à-vis de la perversion omniprésente de la société, perversion qui se véhicule partout par la culture. Il n’est pas normal que la culture moderne s’invite dans les foyers catholiques comme une chose banale et sans conséquence. La nécessité de la mortification, principe central de la spiritualité catholique, doit s’appliquer en premier lieu, dans le monde actuel, à la fuite des occasions de péché données par la culture moderne : si les enfants ne sont pas élevés dans cet esprit de mortification, il ne faut pas s’étonner qu’ils abandonnent la religion ensuite.


Tout le monde a entendu parler de l’enseignement hérétique de Luther du « salut par la foi seule ». Il consiste à dire que l’unique acte nécessaire au salut est l’acte de foi, ce qui signifie pour lui et pour les protestants d’une manière générale la « confiance en Dieu ». Pour les catholiques, la foi veut dire l’assentiment de l’intelligence, par le moyen d’une vertu surnaturelle infusée par Dieu, aux vérités révélées par Dieu et proposées comme telles par l’autorité enseignante de l’Eglise catholique romaine. Ainsi, pour Luther et ses partisans, les péchés ne sont pas retenus contre vous dans l’ordre du salut. Il n’y a aucune nécessité de se mortifier. Aucune nécessité de faire pénitence. Luther disait : « Soyez un pécheur et péchez effrontément, mais croyez et réjouissez-vous en Christ encore plus effrontément … Aucun péché ne nous séparera de l’Agneau, même si l’on commettait mille fois par jour la fornication et l’adultère » [2].

Aucun catholique ne dirait cela. Tout catholique sait qu’il sera jugé sur ses actions au moment de sa mort, et pas simplement sur sa confiance en Dieu. Néanmoins, de nombreux catholiques, et je veux parler ici de ceux qui ont rejeté Vatican II et adhèrent à la foi traditionnelle, tiennent une formule similaire, que je décris comme le salut par la piété seule.

Voici le cas typique. Un tel catholique croit en tout ce que l’Eglise enseigne, récite fréquemment et fidèlement son chapelet, peut-être tous les jours, va à la messe tous les dimanches, participe éventuellement à des pratiques dévotionnelles au cours de la semaine, se confesse souvent, et possède chez lui de nombreuses images de Notre Seigneur, de Notre-Dame et des saints. Peut-être même qu’il dirige chaque soir la récitation du chapelet en famille.

De l’autre côté, ce même catholique vivra selon tous les standards de la culture moderne. Il regarde des productions impures à la télévision, au théâtre ou sur internet. Il écoute de la musique rock. Il élève ses enfants suivant toutes les idées modernes, c’est-à-dire qu’il les laisse suivre leurs instincts sans discipline, ou dans le cadre d’une discipline inefficace. S’il est un homme, il échoue à affirmer son autorité dans le foyer. Si elle est une femme, elle est fortement influencée par le féminisme, et échoue à comprendre son rôle dans la maison.

Ils se vêtissent suivant la mode moderne, aussi immodeste soit-elle. Ils fréquentent des plages bondées où il y a partout une grave impudicité. Ils vont dans des endroits tels que Disneyland : sans commentaire.

Ils acceptent dans leurs familles ceux qui sont « divorcés et remariés », ou qui vivent en concubinage.

Ils envoient leurs enfants dans des écoles qui ont été inventées pour détruire la foi catholique et les bonnes mœurs de leurs enfants. Ils se réjouissent de leurs accomplissements lorsqu’ils en ressortent diplômés, sans se soucier de la destruction spirituelle de leur enfant.

Ils approuvent pour leurs enfants des conjoints qui sont hérétiques, impies, et/ou impurs.

Et lorsqu’enfin leurs enfants, une fois parvenus à l’âge adulte, sont devenus des athées et des gauchistes, ces mêmes catholiques viennent demander au prêtre : « en quoi me suis-je trompé ? »

Ils se sont trompés de la même manière que Luther s’est trompé. Ils pensaient que la piété seule suffirait à faire de leurs enfants des catholiques, et les protégerait des mauvaises influences du monde moderne. Pour Luther, c’était la foi seule ; pour ces catholiques, c’est la piété seule.

Contemplons la Sainte Croix. Il y a deux grandes leçons dans la Croix du Christ : 1- l’amour de Jésus pour Son Père ; 2- la mise à mort du vieil Adam du péché.

Notre Seigneur sur la Croix a obtenu notre salut en donnant à Son Père, au nom de l’humanité qu’il avait lui-même prise, l’obéissance à Sa volonté jusqu’à la mort de la Croix.

Cette obéissance du Christ fut le remède à la désobéissance d’Adam et, en définitive, à la désobéissance de tout homme qui commet un péché. L’agréable odeur de l’obéissance de Son Fils l’emportait de loin sur la puanteur du péché humain. Ceci est un des aspect de la rédemption du genre humain.

L’autre aspect est la mortification de l’homme de péché. Il y avait une peine de mort à payer pour les péchés des hommes, et Notre Seigneur l’a payée. La vie spirituelle catholique est basée sur ces deux aspects de la Croix. D’un côté se trouve l’amour de Dieu, qui inclut l’obéissance aux commandements de Dieu et la piété, c’est-à-dire tous les actes d’adoration et de prière que nous offrons à Dieu. De l’autre côté se trouve la mortification, c’est dire la mise à mort dans nos âmes des effets du péché originel et des péchés actuels. La mortification consiste entre autres choses à éviter les occasions de péché.

La culture moderne est un produit du diable, et constitue une énorme occasion de péché. La piété ne sera pas agréable à Dieu, et ne produira pas de bons effets, si les catholiques boivent chaque jour le poison de la culture moderne.

Si les parents catholiques veulent avoir des enfants catholiques plutôt que des enfants païens, et s’ils veulent avoir des petits-enfants catholiques, il est nécessaire qu’ils se coupent du monde moderne. Cela demande beaucoup de sacrifices : ils ne pourront pas participer aux amusements et aux réjouissances du plus grand nombre. Les enfants doivent comprendre cette nécessité de la mortification et du sacrifice.

Je suis certain que les catholiques qui vivaient dans l’empire romain dans les premiers temps de l’Eglise ont eu le même problème [3]. Rome était un lieu de débauche gratuite, de jeux cruels, d’impudicité grossière, d’idolâtrie et de superstition. L’Eglise a pourtant resplendi dans ces temps anciens : c’est parce que les catholiques s’étaient coupés de la culture païenne de leur temps.

Mgr Donald Sanborn


[1] https://inveritateblog.com/2022/08/29/salvation-through-piety-alone/

[2] Weimar ed. vol. 2, p. 372; Letters I, Luther’s Works, American ed., vol. 48, p. 282.

[3] N.D.T : au IIIe siècle, l’évêque Saint Cyprien de Carthage (mort martyr en 258 sous la persécution de Valérien) écrit un traité contre les spectacles, répondant aux arguments de certains chrétiens tièdes qui, pour ne pas avoir à sacrifier leur sociabilité, leurs habitudes et leur soif de divertissement, prétendaient qu’il était possible d’assister aux jeux du cirque et au théâtre malgré l’infestation du paganisme dans ces divertissements. C’était, en effet, une situation semblable à la nôtre. Ces jeux et ces scènes de théâtre avaient une relation explicite avec l’idolâtrie, ce qui rendait toute participation impossible pour un chrétien – mais saint Cyprien précise bien que même sans ce caractère idolâtre, l’immoralité de ces spectacles devaient suffire à l’en éloigner absolument.

Mais se priver des spectacles infestés de paganisme, est-ce se priver de tout amusement et de tout émerveillement ? Saint Cyprien répond : 

« Ne croyez pas que les spectacles manquent au chrétien s’il sait se recueillir en lui-même, il trouvera des plaisirs vrais et utiles. Je ne parlerai pas de ces beautés qu’il ne nous est pas encore permis de contempler; mais combien d’autres se présentent à nos regards! La magnificence du monde, le lever et le coucher du soleil amenant l’alternative des jours et des nuits; le globe de la lune, marquant par ses diverses phases la fuite rapide du temps; les constellations qui brillent sur nos têtes, le cercle des saisons, la terre se balançant dans l’espace avec ses montagnes et ses fleuves; les mers avec leurs flots et leurs rivages; l’air répandu partout et nous donnant tour-à-tour la pluie et la sérénité; tous ces éléments divers alimentant chacun les habitants qui lui sont propres, l’air les oiseaux, l’eau les poissons. la terre les hommes, voilà les spectacles dignes d’un chrétien.

Quel théâtre, bâti par les hommes, pourra être mis en parallèle avec les œuvres du Créateur? supposez les pierres aussi grandes que vous le voudrez, ce n’est qu’un fragment de montagne, et les lambris dorés ne feront jamais pâlir l’éclat des astres. On admire bien peu les œuvres humaines quand on se reconnaît fils de Dieu; et d’ailleurs se serait manquer à sa noblesse que de ne pas réserver au Créateur toute son admiration.

Que le chrétien étudie les saintes Écritures : là encore il trouvera des spectacles dignes de sa foi. II verra Dieu créer le monde ainsi que les animaux et les soumettre au pouvoir de l’homme. Il verra les méchants engloutis dans un naufrage commun et les justes miraculeusement sauvés. Il verra la mer se dessécher pour offrir un chemin au peuple de Dieu et les rochers s’ouvrir pour le désaltérer. Il verra la nourriture descendre du ciel pour le nourrir, les fleuves enchaîner leurs eaux, les justes sauvés d’une fournaise ardente, les bêtes féroces domptées par la foi, les morts sortir de leurs tombeaux, et pour couronner .le spectacle, le démon, qui avait soumis le monde à son empire, abattu sous les pieds du Christ. Quel spectacle mes frères! qu’il est magnifique! qu’il est agréable! qu’il est utile! Il renferme tout ce qui anime notre espérance et assure notre salut. On peut en jouir, même quand on a perdu l’usage de ses yeux. Ce spectacle, ce n’est pas un consul, un prêteur qui le donne, mais c’est le Créateur de toutes choses, le seul Dieu unique, le Père de Notre-Seigneur Jésus-Christ glorifié et béni dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il. »

http://jesusmarie.free.fr/cyprien_de_carthage_les_spectacles.html


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