Pourquoi être catholique plutôt qu’orthodoxe (7/7)

Conclusion : le faux attrait de “l’orthodoxie” se base sur des considérations superficielles. A la lumière de la foi, il s’agit d’une chose détestable. 

La mode de l’attrait pour la soi-disant orthodoxie parmi certains catholiques traditionalistes ne se base pas sur de sérieuses considérations historiques ou doctrinales. Nous avons vu dans le précédent aperçu que la papauté n’est pas une invention des catholiques du XIe siècle, ou encore de Saint Augustin et des Pères Latins, mais bien quelque chose dont les fondements se trouvent dans la Bible et dans les témoignages des premiers chrétiens, bien avant que Photius ne commence sa détestable révolte contre l’autorité de Rome. 

A notre avis les raisons de cet attrait résident pour une large part dans l’ignorance plus ou moins complète de l’histoire de l’Eglise, dans une formation doctrinale superficielle, et dans des raisons relativement frivoles telles que : 

  1. Le conservatisme liturgique et moral des églises orthodoxes. Ce conservatisme ne concerne en réalité que des choses superficielles ; au point de vue doctrinal, les “orthodoxes” ont complètement divergé de la foi sur certains sujets essentiels, et ne possèdent pas de véritable unité de foi et de doctrine une fois que l’on sort de ce qui a été défini par les premiers conciles (que l’on prenne, par exemple, la célèbre controverse de l’hésychasme). Leurs “églises” ont d’ailleurs connu l’équivalent de Vatican II, même s’il n’y a pas eu de réforme liturgique. Il serait naïf de croire que les “orthodoxes” ne sont pas influencés par le monde moderne, comme si cela devait les distinguer de ce qui s’est passé dans le monde catholique.
  1. L’admiration pour la Russie : dans un monde où tout s’effondre, on se contente de peu et il suffit qu’une nation soit un peu moins avancée dans la décadence politique et morale, moins avancée dans le mondialisme dissolvant pour qu’on en conçoive une image de bastion de la vertu. Il s’agit encore une fois d’une vision naïve et superficielle. S’il est vrai que la Russie promeut en général des principes plus sains que ceux de l’Occident actuel, la Russie reste à certains égards un pays décadent souffrant encore des conséquences du communisme, un pays fondé sur les mêmes principes erronés que le reste des « démocraties occidentales »[1], un pays qui n’est d’ailleurs pas beaucoup plus religieux qu’un pays comme l’Italie ou le Portugal, c’est à dire que la religion fait partie d’un folklore populaire et reçoit un certain respect de la part de la population, voir même une certaine place dans la vie publique, ce qui n’empêche pas l’irréligion pratique de la majorité de la population, la contraception, l’avortement, le libéralisme intellectuel et moral parmi les élites et jusque dans la constitution du pays, la vulgarité et l’immoralité crasse parmi les classes populaires.
  1. Une fausse conception de “la Tradition” comme seule norme de la vérité et seule source d’infaillibilité. Ce point explique peut-être le plus la dangereuse porosité entre les milieux traditionalistes (spécialement lefebvristes) et la soi-disant orthodoxie gréco-russe. Comme les traditionalistes s’opposent à celui qu’ils pensent être le pape, tout en continuant de dire qu’il est bien certain qu’il est le pape, ils en arrivent à bricoler un système théologique hasardeux dans lequel il est possible pour tout chrétien de refuser les enseignements et les actes disciplinaires du pape si jamais ils vont contre “la Tradition”, contre “ce qui a été cru partout et toujours”. La manière dont ils utilisent le “canon de Saint Vincent de Lérins” est, justement, la même interprétation que celle des schismatiques sur le fait que la seule norme de la foi est “l’enseignement des Pères” et que l’on peut rejeter le pape si l’on estime qu’il ne s’y conforme pas. Nous avons vu plusieurs anciens catholiques rejeter la papauté pour embrasser le schisme, sous le prétexte que “les Pères n’enseignent pas l’Immaculée Conception”, “les Pères n’enseignent pas la papauté”, “les Pères n’enseignent pas le Filioque”, oubliant complètement – en plus d’utiliser des arguments faux et maintes fois réfutés – la doctrine catholique sur la norme prochaine de la foi, qui n’est pas “l’enseignement des Pères” (car quoi qu’on en dise, il est très rare que les Pères de l’Eglise s’expriment exactement de la même manière sur exactement les mêmes sujets, il y a toujours quelques zones d’imprécision ou de contradictions entre eux, il y a toujours des Pères qui ont des opinions qui sortent de l’ordinaire, etc) mais le magistère de l’Eglise enseignante et spécialement le magistère du Pape. Il ne devrait pas poser de problème, pour quelqu’un qui a reçu une bonne formation catholique, d’accepter que certains points de doctrine qui n’ont pas fait l’unanimité chez les Pères ont plus tard fait l’objet de définitions magistérielles par les Conciles et par les Papes, indépendamment du nombre et de la qualité des défenseurs de cette doctrine dans l’antiquité chrétienne. 
  1. La fascination pour une “spiritualité orientale” qui serait “non rationnelle” ou “supra rationnelle” : il y a sans doute quelque chose de plus pervers dans cette préoccupation que dans les précédentes. La maladie du pérennialisme, nom de la doctrine de René Guénon, infeste depuis longtemps les milieux traditionalistes et il devrait être inutile de rappeler à quel point cette doctrine est contraire à la foi, et destructive des fondements mêmes de la foi au même titre que le modernisme. Le pérennialisme, qui est en réalité de l’hindouisme à destination d’un public occidental de droite, fait résider la vérité religieuse dans une forme de connaissance “non rationnelle”, dans une “expérience du divin” qui se passe de description et de démonstration, et qui postule en une “non dualité” ou unité transcendantale de toutes choses, bonnes ou mauvaises, en Dieu. Il s’agit en d’autres termes d’un panthéisme anti-intellectualiste, qui considère que le moral et l’immoral, le vrai et le faux, le bien et le mal, sont mystérieusement unis dans l’être divin. Seule la vanité de la démarche ésotérique, qui flatte certains esprits se sentant “au-dessus du vulgaire”, peut expliquer l’aveuglement en faveur de ce genre de doctrines, auprès d’un public qui par ailleurs dénonce l’abandon du réel et de la raison dans la vie sociale.
    Il semble que les disciples de Guénon, qui prétendent que l’on a une expérience religieuse “valide” à partir du moment où l’on se rattache à une des “religions traditionnelles” (catholicisme compris), aient une attirance spéciale pour les schismatiques orientaux, entre autres choses parce que l’ambiance est beaucoup moins “cadrée” au niveau doctrinal que dans le catholicisme : un “orthodoxe” peut penser à peu près ce qu’il veut sur toutes sortes de sujets, il n’y a pas d’autorité infaillible pour lui dire qu’il se trompe et condamner sa doctrine. Ils pensent d’ailleurs, à propos de la spiritualité, de la mystique ou de la politique, toutes sortes de choses étranges et peu raisonnables. C’est justement cette perception d’une “absence de cadre” qui attire ceux qui inclinent vers une forme d’ésotérisme et trouvent que la scolastique “dessèche l’expérience religieuse”. L’attachement extérieur aux traditions anciennes est également une chose qui attire les esprits séduits par le pérennialisme.
    Ce modernisme de droite mérite toute la détestation des catholiques. Soyons bien convaincus qu’il n’y a aucune contradiction entre une connaissance rationnelle de Dieu et des vérités révélées, et une vie intérieure riche et active ; en réalité, la véritable vie intérieure est impossible sans une certaine connaissance rationnelle, même très rudimentaire, de Dieu et des choses relatives à Dieu.
    Comment peut-on avoir une dévotion sincère envers Dieu, si on n’est pas certains pour commencer que Dieu existe réellement et que son existence est certainement démontrable et accessible à toutes les intelligences ? Si l’on n’accepte pas cela, on réduit Dieu à une sorte de sentiment personnel qui ne concerne pas l’ensemble des hommes. C’est une insulte à son infinie majesté, à sa bonté, à sa toute-puissance, et à l’enseignement qu’il a lui-même donné aux hommes (Saint Paul dit que les païens qui n’adorent pas Dieu “sont inexcusables”, parce que son existence est manifestée par ses œuvres, et qu’ils devraient l’adorer en conséquence). 

Aucune de ces raisons ne sont recevables lorsqu’il s’agit de juger l’histoire de l’Eglise dans son ensemble, les témoignages des premiers chrétiens, la doctrine des Pères et la vie de la chrétienté depuis le commencement jusqu’à nos jours.

L’examen de ces différents arguments doit nous faire conclure, sans appel, qu’il est impossible de se sauver si l’on est séparé de l’unique Eglise catholique, apostolique et romaine, que l’on est aux yeux de Dieu pire qu’un païen si  l’on se sépare volontairement de l’unité de l’Eglise : tel est l’enseignement des Pères sur les schismatiques.

La crise de l’Eglise que nous traversons aujourd’hui ne doit pas affaiblir notre foi et notre amour en l’Eglise, mais au contraire la raffermir : quel enfant, voyant sa mère malade, s’en détournerait à ce moment parce qu’il ne peut plus se reposer sur son aide comme avant ? Ne faut-il pas justement, dans ce moment dramatique, exprimer un amour spécial pour l’Eglise ?   

Les saints étaient prêts à mourir pour l’Eglise, et certains en effet sont morts pour son honneur. Songeons par exemple à Saint Thomas More, qui fut décapité pour avoir maintenu face aux schismatiques anglais que le Pape avait une juridiction suprême dans toute la chrétienté. Regardons comme une insulte et un déshonneur à l’Église les manifestations insolentes de “l’orthodoxie”, qui profite de Vatican II pour essayer de faire croire aux catholiques restés fidèles que la “vraie tradition” se trouve du côté du schisme gréco-russe. Il vaut mieux mourir sous les pires tortures que de donner le moindre crédit à ces fables hérétiques : telle est la foi que nous avons reçu, hors de l’Eglise fondée par Jésus-Christ sur Saint Pierre, il n’y a pas de salut.

Puisse Dieu donner aux schismatiques les lumières et les grâces pour comprendre que la véritable Eglise et la véritable doctrine chrétienne se trouvent dans la communion de Saint Pierre. Si les propos tenus précédemment peuvent sembler durs et condamnatoires (et ils le sont), la charité nous commande de ne pas oublier, derrière les arguments, les personnes et les âmes à sauver. Nous n’avons pas espoir de convaincre les esprits séduits par le schisme oriental par ces controverses et ces arguments, mais nous avons espoir, par nos prières, d’aider à leur conversion et à leur retour dans l’Eglise, car cela dépends de la grâce de Dieu. 

A ceux qui sont déjà catholiques, puisse Dieu nous donner la grâce de vivre toujours et de mourir dans l’amour de l’Eglise, dans la communion avec l’Eglise, dans la défense de ses titres et de son honneur, elle qui est la mère de tous les peuples, la maîtresse de la vraie doctrine et la seule arche du salut. Ainsi soit-il. 

Jean-Tristan B.


[1] La constitution russe est en effet basée sur les mêmes principes que l’Occident décadent : souveraineté du peuple, liberté de pensée, liberté religieuse, séparation de l’Eglise et de l’Etat, etc.


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